
Pour faire de bons films, il faut de bonnes idées et une bonne équipe sur laquelle s’appuyer. Paroles d’un maître. En l’espace de quelques années, Hosoda Mamoru est devenu l’un des réalisateurs d’anime les plus recherchés puisque ses films ont été de grands succès au Japon. Cette année, le Festival international du film de Tôkyô (TIFF) lui a même consacré une rétrospective spéciale. C'est au TIFF que Zoom Japon a réussi à obtenir une interview exclusive. Les Enfants loups, Ame et Yuki et Le Garçon et la bête ont plusieurs thèmes importants en commun. L'un d'entre eux est la relation entre les hommes et les animaux. Hosoda Mamoru : L’idée de départ des Enfants loups [disponible en DVD chez Kazé] vient d’une expérience assez drôle. Un jour, je parlais à une jeune femme de mon projet de faire une histoire autour de l’éducation des enfants. Elle m’a dit qu’élever un gamin était comme avoir un monstre ou un animal sauvage à la maison. Sa remarque m’a inspiré pour créer des enfants à moitié humain et à moitié animal. Les deux films s’intéressent aussi à la relation parent/enfant. Etait-ce juste une coïncidence ou votre volonté d’explorer ce thème en profondeur ? H. M. : C'est vrai que je voulais donner un sentiment de continuité entre les deux histoires, mais en même temps, je souhaitais aborder le même sujet de deux points de vue différents. Ainsi, dans Les Enfants loups (voir Zoom Japon, n°23, septembre 2012), nous voyons une femme s’attaquer à la difficile tâche d’élever seule deux petits enfants, alors que dans Le Garçon et la bête [disponible en DVD chez Kazé], nous avons un père qui doit faire face à l’échec de son mariage et essayer de reconstruire sa relation avec son fils tout en regagnant sa confiance. D’ailleurs, la dichotomie mère/père a également influencé mon choix pour la localisation des films. Pendant notre enfance et notre adolescence, par exemple, nous sommes plus proches de notre mère. Vous pourriez dire que cette relation est plus naturelle qu’intellectuelle, c'est pourquoi j’ai planté le décor des Enfants loups à la campagne. Nous nous rapprochons de notre père lorsque nous commençons à faire nos premiers pas vers l’âge adulte et l’indépendance, ou quand nous entrons à l’université ou nous commençons à chercher un emploi. J’ai pensé que pour Le Garçon et la bête, Ren devrait se trouver dans une ville, c'est-à-dire dans un environnement plus hostile et plus difficile. Grandir est un autre thème que ces deux films ont en commun. Dans Les Enfants loups, nous suivons les deux jeunes protagonistes de leur naissance jusqu'à leurs 13 ans, tandis que dans Le Garçon et la bête, l'histoire de Ren se développe sur une période de huit ans. Vous semblez être particulièrement intéressé par ce sujet. H. M. : Ce n’est pas exagéré de dire que c’est le sujet qui m’intéresse le plus. Qu’est-ce que grandir ? Que doivent faire les parents pour assurer le développement de leurs enfants ? Les petits enfants expérimentent tout pour la première fois. Dans ce sens, l’enfance est une période très intense – probablement la plus intense – de notre existence. En tant qu’êtres humains, nous changeons constamment, mais pourquoi et comment changeons-nous ? Les petits garçons ne pensent pas aux filles. Ils ne veulent pas jouer avec elles, et les considèrent même comme une nuisance. Puis la puberté les frappe et ils tombent amoureux fou d’une fille de leur classe. Le contraire se produit avec nos parents. Quand nous sommes des enfants, notre mère et notre père sont tout pour nous, et lorsque nous entrons au collège, tout à coup, nous ne pouvons plus supporter ce qu’ils nous disent. Je trouve ces questions extrêmement fascinantes. Malheureusement, une fois que nous vieillissons, nous perdons ce sentiment d'émerveillement. Nous devenons obstinés, inflexibles. Mais je crois que même les adultes peuvent apprendre quelque chose des enfants en observant la façon dont ils changent et grandissent. En un sens,...
