L'heure au Japon

Parution dans le n°58 (mars 2016)

Cinq ans après les ravages du tsunami, la cité portuaire se reconstruit grâce à l’engagement de tous ses habitants. Sur le flanc de la colline d’Onagawa se trouve le belvédère de l’hôpital qui domine la ville. On vient voir une langue de terre aux couleurs ambrées glissant entre deux montagnes jusqu’à l’océan. Des tractopelles sont en action depuis 5 ans. Les habitants balayent l’horizon avec leurs bras, désignant des habitations effacées, retraçant l’avenue principale qui descendait jusqu’à la marina et son centre commercial, lui aussi emporté par le tsunami. Le 11 mars 2011, au milieu de l’après-midi, une vague a déferlé sur la ville détruisant la quasi-totalité des bâtiments. Reste cet hôpital. Son premier étage surplombant le bord de mer à 16 mètres de hauteur fut lui aussi envahi par les eaux. Il a été réhabilité grâce à des dons venus de Suisse. Désormais, de l’autre côté, sur sa gauche, la nouvelle ville prend forme. Remise en service en mars 2015, la gare d’Onagawa est le terminus de la ligne d’Ishinomaki. Elle a été déplacée d’une centaine de mètres par rapport à l’ancienne, neuf mètres au-dessus du niveau de la mer. Elle a été conçue comme une porte sur le nouveau centre-ville. Pour l’instant, les habitants viennent par curiosité. Ils vivent pour la plupart dans des préfabriqués construits sur les hauteurs et se félicitent du résultat. L’ambiance invite à la détente et séduit un nouveau type de population venant de loin pour découvrir ce petit port de pêche réaménagé. Après le tsunami, le projet initial de reconstruction prévoyait de créer une digue qui aurait eu pour conséquence de former un mur entre la ville et la mer. En suivant les directives gouvernementales, beaucoup d’autres cités touchées par la déferlante ont fait ce choix. La ville voisine d’Ishinomaki, dont un des quartiers en bord de mer a entièrement disparu, a vu son horizon se réduire de sept mètres. En voiture ou en bus, on longe son front de mer à l’ombre d’une imposante digue qui répond aux normes des tsunamis millénaires. Onagawa a refusé le projet des autorités, les habitants ont pris leur destin en main et ils ont décidé de réinventer leur ville. Après la catastrophe, la prise de conscience s’est faite rapidement, elle a bénéficié d’un contexte favorable. Un nouveau maire, plus jeune, 39 ans, a été élu. Il a quitté son poste de député départemental pour se consacrer seulement à la ville. Un marché et un “centre-ville de fortune” ont été réaménagés en périphérie. Une campagne de communication a été montée par l'agence de presse régionale Kahoku pour le soutenir. Une soixantaine de graphistes ont réalisé, avec beaucoup d’humour, des portraits de ces commerçants, lesquels ont été largement diffusés sur les réseaux sociaux. Les regards se sont alors tournés vers cette ville. Des espaces dédiés aux réunions et aux assemblées ont rapproché les habitants. L’usine Maskar, spécialisée dans la congélation des produits de la mer, principale ressource de cette ville de pêcheurs, a repris ses activités en 2012, grâce au soutien du Qatar. On vient de loin pour déguster son Onagawa-don, un bol composé de poissons et crustacés...

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