L'heure au Japon

Parution dans le n°129 (avril 2023)

L’écrivain Inoue Yasushi fut l’un des principaux soutiens du prix Konishi. / Fondation Konishi pour les Échanges Internationaux Depuis 30 ans, la Fondation Konishi pour les échanges internationaux soutient la traduction franco-japonaise. Créée en 1983, avec l’approbation du ministère des Affaires étrangères japonais, grâce au soutien de sociétés mécènes travaillant dans le domaine médical et pharmaceutique, à l’initiative de feu Konishi Jin-emon, alors à la tête de la société Nippon Zoki Pharmaceutical Co., Ltd, la Fondation Konishi pour les Échanges Internationaux a initialement été pensée pour soutenir la recherche scientifique internationale et la formation des personnes, en particulier entre le Japon, la Chine et la France. C’est sur le conseil de l’écrivain Inoue Yasushi, un des premiers administrateurs, qu’elle décida d’étendre le champ de ses activités à des programmes d’échanges culturels, surtout avec la France, et plus particulièrement par le biais de la traduction.Les premiers projets soutenus furent la publication en français de deux anthologies de littérature contemporaine japonaise, l’une de nouvelles, l’autre de poésies, aux éditions Gallimard, à l’automne 1986. Inoue estimait pertinent de faire découvrir aux Français la littérature japonaise moderne, par ces formes littéraires qui “rendent particulièrement bien compte du regard qu’a un pays sur la vie et la mort” et témoignent de la créativité des auteurs japonais stimulés justement par des formes d’écriture découvertes à la lecture de traductions, notamment d’œuvres françaises. Il proposa alors un travail de traduction et de relecture mené en collaboration entre professeurs japonais et français pour assurer la meilleure transmission possible. Cet attachement à “l’excellence de la traduction” voulu par Inoue Yasushi restera un objectif spécifique de la Fondation lorsqu’elle créera, en 1993, le Prix Konishi de Traduction Littéraire auquel des écrivains tels que les regrettés Ôe Kenzaburô et Ôoka Makoto apporteront leur concours dès la première heure.En même temps que la Fondation est reconnue d’utilité publique au Japon, en 2013, Mme Konishi Chizu, en prend la présidence et, lors des cérémonies de remise des Prix aux lauréats, elle exprime son plaisir de “découvrir chaque année la profondeur des échanges franco-japonais et de sentir chaque fois l’importance de la mission de la Fondation, à savoir que, grâce à ce Prix, le rôle du traducteur soit mieux compris et son travail considéré à sa juste valeur”.Le Prix de traduction littéraire veut récompenser mais aussi faire mieux reconnaître le travail de ces personnes, qui, le plus souvent dans l’ombre, permettent aux lecteurs français et japonais d’accéder à d’importants écrits (voir Zoom Japon n°124, octobre 2022). Depuis sa création (à l’exception d’une interruption entre 2003 et 2006 qui a permis de vérifier combien il était précieux qu’il soit maintenu), il est annuellement décerné à une traduction de qualité, du japonais vers le français et du français vers le japonais, d’un ouvrage lui-même considéré de grande qualité, dans le domaine de la littérature ou des sciences humaines. Un Prix spécial peut également être décerné à un traducteur pour l’ensemble de son travail contribuant au développement de la traduction franco-japonaise. De plus, afin de préparer l’avenir, le comité français peut décerner un Prix d’encouragement destiné à un traducteur faisant preuve d’un talent prometteur, même si son expérience est encore limitée, et lui apporter un soutien pour poursuivre son activité de traduction. Enfin, attachée à être aussi en phase avec l’évolution des échanges entre la France et le Japon, la Fondation a créé en 2017 un Prix pour la traduction de manga japonais en français, lui aussi unique, remis chaque année au Festival de la bande dessinée d’Angoulême (Voir Zoom Japon n°77, février 2018).La sélection pour le Prix est effectuée séparément par un jury japonais pour le Prix de traduction du français en japonais et par un jury français pour la traduction du japonais en français. La proclamation elle, se fait conjointement. La liste des lauréats depuis 1994 est impressionnante. Avec le recul, on voit combien le Prix a distingué des traducteurs qui n’ont jamais cessé ensuite leur travail de “passeurs essentiels” comme les nomme Philippe Forest et les ouvrages qu’ils ont rendus accessibles restent des œuvres particulièrement remarquables des littératures japonaise et française, classiques ou récentes, et forment un riche panorama de romans, poésies, sciences humaines ou essais.Ce 1er avril 2023, les deux comités français et japonais ont annoncé leur choix des lauréats du28e Prix. Le lauréat français est Morvan Perroncel (voir pp. 9-10) pour sa traduction deLe Fascisme japonais de Maruyama Masao publié par Les Belles Lettres en 2021.Renouvelé en 2022, le comité français, sous la présidence de Cécile Sakai, professeure émérite de l’Université Paris-Cité, rassemble la traductrice et auteur Corinne Atlan, le professeur à l’INALCO Emmanuel Lozerand et l’écrivain et professeure à l’Université Paris 8 Olivia Rosenthal qui prend le siège de Philippe Forest qui avait lui-même succédé à Michel Tournier. C’est en effet une tradition importante du Prix d’être décerné par un jury de japonologues et traducteurs éminents mais aussi d’un écrivain non japonisant, pour sa lecture de la traduction “comme s’il s’agissait d’une œuvre originale en français”.Selon le jury, “plus de 70 ans après ces publications, cette excellente traduction permet de continuer à transmettre en France la pensée critique de Maruyama Masao. La qualité de ces travauxtraverse ainsi les décennies et les frontières. L’ouvrage est en outre très bien édité, avec un glossaire détaillé et un long commentaire scientifique du traducteur, par ailleurs...

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