L'heure au Japon

Parution dans le n°48 (mars 2015)

Ishinomaki chantier seisme japon

Quatre ans ont passé depuis le séisme du 11 mars 2011. La ville commence à reprendre forme. Cela fait quatre ans que le grand séisme qui a affecté le nord-est du Japon s'est produit le 11 mars 2011. Moins d'un an plus tard, le gouvernement a créé l’Agence pour la reconstruction dont la mission a été limitée à 10 années à partir de la survenue de la catastrophe. La période de reconstruction intensive au cours de laquelle le gouvernement accorde des subventions aux collectivités locales est de 5 ans à compter du séisme. Si le Premier ministre Abe Shinzô, qui a soutenu la candidature de Tôkyô pour l'organisation des Jeux Olympique en 2020 a bien déclaré que  “sans la reconstruction des régions sinistrées, il n’y aurait pas de renaissance du Japon”, il n'empêche que les sinistrés ne recevront plus d’aides directes de l’Etat à compter de 2016. Voilà pourquoi nous avons voulu savoir ce qu'il en était de la situation des 6 préfectures et des 62 communes concernées. Pour le savoir, nous nous sommes rendus à Ishinomaki, préfecture de Miyazaki, siège de l'Ishinomaki Hibi Shimbun, quotidien local avec lequel nous collaborons depuis mars 2011. Située à 420 km au nord-est de Tôkyô, à 50 km de Sendai, au bord de l’océan Pacifique, la ville d’Ishinomaki a subi la plus grande perte humaine de la catastrophe avec plus de 3 700 habitants décédés ou portés disparus. Lors du séisme, un tsunami de 8,6 m de hauteur s’est abattu sur le port au sud de la ville, avant de ravager les zones industrielles et les quartiers d’habitation. Il a remonté à contre-courant le fleuve Kyû-kitakami qui traverse longitudinalement la ville pour atteindre le centre-ville et provoquer d’énormes dégâts. A regarder plus concrètement les chiffres, 73 km2, soit 13,2% de la superficie de la commune (555,78 Km2) ont été submergées, ce qui correspond à la superficie de la ville de Nice. A cause de ces inondations, 76% de ses habitations, soit 57 000 maisons ont été endommagées, dont 20 000 totalement détruites. Depuis 2012, l’équipe de Zoom Japon s’est rendue chaque année dans cette cité accompagnée de journalistes de l’Ishinomaki Hibi Shimbun qui connaissent mieux que quiconque leur ville, afin d’observer ce lieu sinistré et l’état de sa reconstruction. Fin décembre 2014, nous sommes arrivés à la gare d’Ishinomaki après avoir pris le shinkansen à Tôkyô, puis le car. Sur la façade de la gare, on pouvait encore apercevoir le slogan accroché depuis 2011 “Courage, Ishinomaki !”. Sur la place, submergée il y a quatre ans, les bus arrivent et repartent, et à côté de la file de taxis, salariés et étudiants pressent le pas. Un banal paysage quotidien. Devant nous, la grande rue avec des bistrots proprets appartenant à des chaînes, c’est aussi le paysage ordinaire d’une ville de campagne. Ici, nos yeux sont attirés immanquablement par les statues des héros de mangas créés par Ishinomori Shôtarô, mangaka originaire de la préfecture de Miyagi. Ces statues se tiennent debout aux endroits stratégiques, depuis la gare, en passant par les rues principales et les rives du fleuve Kyû-kitakami qui coule juste à côté. Elles ont été érigées dans le cadre de la campagne “La ville de manga”, dont le centre est le musée mémorial dédié à ce créateur des mangas, Ishinomori Manga-kan, construit sur une petite île du fleuve. Ce musée qui a aussi subi des dégâts terribles du tsunami, est resté fermé pendant un an et demi. Mais pendant tout ce temps, les statues ont continué à se dresser vaillamment, comme si elles voulaient donner du courage à ceux dont le cœur avait tendance à s’assombrir en marchant dans cette ville endommagée. Après le séisme, la ville d’Ishinomaki a établi, un plan de reconstruction décennal en balisant chaque étape de sa réhabilitation. Les trois premières années ont été définies comme une période de reconstruction, les quatre années suivantes comme celle de la renaissance et les trois dernières comme celle du développement. Ce plan est financé, en principe, dans le cadre du budget gouvernemental pour la reconstruction, mais l’approbation des crédits se fait au niveau de l’Etat. Comme il faut que l’autorité locale demande l’approbation des crédits de la part de l’Etat pour chaque action, les demandes faites par les habitants n’ont pas toujours été acceptées. Surtout dans la première période où les efforts se sont concentrés sur la reconstruction des bases de la vie quotidienne et des infrastructures, en se basant sur le principe de “reconstruire comme avant”. Les actions visant à améliorer en même temps la situation qui était déjà mauvaise avant la catastrophe ont été refusées et le manque de souplesse de l’Etat a été pointé du doigt de la part de ceux qui œuvrent sur place. “Juste après le séisme, l’urgence était telle que, très souvent, on ne pouvait pas attendre l’approbation de l’Etat. Des vies humaines en dépendaient. Parfois on...

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