
Thomas Ash a réalisé le documentaire Ushiku qui décrit les difficultés rencontrées par les réfugiés au Japon. / Eric Rechsteiner pour Zoom Japon Dans Ushiku, Thomas Ash raconte la dureté des conditions de détention des réfugiés en attente d’une décision. D ans le dernier film du documentariste Thomas Ash, Ushiku, qui est actuellement projeté dans les cinémas japonais, il est question de l’un des 17 centres d’immigration du Japon situé à Ushiku, ville de la préfecture d’Ibaraki, au nord-est de Tôkyô. Ces lieux ont acquis ces dernières années le statut tristement célèbre de “prisons de facto” où sont détenus des étrangers pendant de longues périodes, soumis à des violences physiques et psychologiques. Zoom Japon s’est entretenu avec le réalisateur de son film et de la politique d’immigration controversée du Japon. Comment vous est venue l’idée de ce film ?Thomas Ash : Je suis membre d’une église locale au Japon. Un autre membre m’a invité à me joindre à un groupe de bénévoles qui visitent le Centre d’immigration de l’est du Japon (nom officiel d’Ushiku) et apportent leur soutien aux personnes qui y vivent. En discutant et en apprenant à connaître certaines de ces personnes, j’ai compris qu’elles avaient très peu d’occasions de faire connaître leur histoire en dehors du centre. J’ai donc décidé de filmer mes rencontres avec eux. Je pensais que filmer à l’intérieur de ces installations était interdit.T. A. : C’est le cas. J’ai donc utilisé une caméra cachée. C’est pourquoi les images sont souvent floues et les voix quelque peu étouffées. Tout a été fait dans la plus grande discrétion. N’en avez-vous pas subi les conséquences ?T. A. : En réalité, aucune loi n’interdit ce que j’ai fait. C’est juste une règle que le centre de détention a inventée parce qu’ils ne veulent pas que les gens sachent ce qui se passe à l’intérieur. Vous pouvez voir ce que j’ai fait comme un acte de désobéissance civile. Pour moi, si nous obéissons aux lois qui violent les droits de l’homme, nous devenons nous-mêmes les auteurs de ces crimes. Extrait d’Ushiku, le documentaire réalisé par Thomas Ash. / © Thomas Ash 2021 Neuf personnes retenues à Ushiku sont présentées dans ce film. Pourquoi y sont-elles ?T. A. : Pour différentes raisons. Les cas qui intéressent les journaux sont ceux des réfugiés politiques et des demandeurs d’asile. Ils peuvent entrer au Japon en tant que touristes et demander ensuite le statut de réfugié. D’autres font leur demande dès leur arrivée à l’aéroport. Ils sont considérés comme des personnes ayant dépassé la durée légale de séjour même si elles sont entrées sans visa. Toutes ces personnes ne peuvent pas retourner dans leur pays en raison de conflits ou parce qu’elles sont persécutées politiquement et risquent d’être arrêtées, torturées ou même tuées. Malheureusement, le Japon a un mauvais bilan en matière d’accueil des réfugiés puisque le taux de reconnaissance est extrêmement faible (0,4 % en 2019).Il y a ensuite ceux qui vivent au Japon depuis un certain temps mais qui, pour une raison ou pour une autre, n’ont pas été autorisés à renouveler leur visa et ont été déclarés résidants illégaux avec ordre de quitter le pays. Cependant, certains d’entre eux refusent de partir. Par exemple, disons qu’un homme vit au Japon depuis 30 ans. Il a une femme et des enfants. C’est autant de raisons humanitaires pour lesquelles ils ne devraient probablement pas être renvoyés. Il est alors placé dans un centre de rétention. Dans d’autres cas, un ordre d’expulsion peut être émis, suivi d’une tentative d’expulsion qui échoue. En effet, les autorités japonaises utilisent principalement des vols commerciaux pour les expulsions, et non des vols charter. Ainsi, le pilote peut toujours...
