
Figure montante de la scène littéraire, l’écrivain est traduit pour la première fois. Il est le coup de cœur de Zoom Japon. Il n’y a pas meilleure école que la vie. Ikeido Jun le démontre en signant La Fusée de Shitamachi (Shitamachi roketto) qui vient de paraître chez Books Editions. Un nouveau roman où les personnages plus vrais que nature évoluent dans une PME des quartiers populaires de Tôkyô sur un fond de lancement de navette spatiale. Le secret de son alchimie, c’est d’avoir été lui-même employé de banque pendant sept ans avant de devenir un des écrivains les plus populaires du Japon. Distingué par plusieurs prix, dont le prestigieux prix Naoki, Ikeido innove un nouveau genre de roman d’entreprise où se côtoient suspense et drame psychologique à travers le quotidien d’une PME aux prises avec les grands manitous industriels. L’ambiance rétro y est typique des PME de l’ère Shôwa (1950-1970), une époque d’après-guerre où ces petites entreprises formaient le tissu industriel de l’archipel en pleine expansion. Vendu à plus de 320 000 exemplaires, La Fusée de Shitamachi est aussi un roman du Japon post-Fuku-shima. Une période de crise économique, environnementale et psychologique où les Japonais ont, plus que jamais, besoin de se rattacher à des valeurs culturelles. Ecrit bien avant la triple catastrophe du 11 mars 2011, le livre est devenu, malgré lui, une référence pour toutes les PME japonaises. Premières victimes de la crise après l’éclatement de la bulle des années 1990, ces sociétés qui avaient porté le miracle économique nippon se retrouvent désormais fragilisées. Mais à l’image de l’entreprise Tsukuda qui se bat pour faire reconnaître son brevet d’invention, les machi kôba, comme on les appelle familièrement, n’ont pas dit leur dernier mot. Leur force? le génie artisanal et technologique du made in Japan. Alissa Descotes-Toyosaki Tout d'abord, quel sentiment cela vous procure-t-il d'être traduit dans une autre langue, et notamment le français ? Ikeido Jun : Jusqu’à présent, aucun de mes livres n’avait jamais été traduit en langue étrangère. Je suis donc ravi de pouvoir être lu ailleurs dans le monde ! La Fusée de Shitamachi est une fiction, mais il y a une forte dose de réalité dedans. Avez-vous fait un travail de recherche au préalable ? I. J. : Non, je n’ai pas fait d’enquête. Au départ, je voulais parler de plusieurs PME qui veulent lancer une grande fusée. Je suis allé voir un chef de PME spécialisé dans la fabrication de pièces pour l’aérospatiale et je lui ai parlé de mon projet. Il m’a dit que c’était complètement surréaliste! Ensuite, j’ai proposé l’exemple d’une PME qui fabrique des pièces détachées pour les fusées et détient un brevet, et comme l’idée pouvait tenir la route, je suis allé visiter quelques opérateurs de satellite et aussi le centre spatial de l’île de Tanegashima, au sud de l’archipel. L’arrondissement d’Ôta, à Tôkyô, où se déroule l’histoire a t-il un rôle important ? I. J. : Jadis, on disait que si l’on rassemblait toutes les PME de ce quartier, on serait en mesure de construire une fusée ! Cela m’a plu comme idée. Ôta est spécialisé depuis longtemps dans les technologies de pointe, de la même manière que la fabrication de produits moins sophistiqués, comme la production de sandales en paille par exemple, se concentre plutôt dans l’arrondissement de Kôtô. A présent, la plupart des usines d’Ôta ont été transférées à l’extérieur de l’arrondissement, mais cela reste quand même un quartier de référence. En montrant l’orgueil d’une petite entreprise, avezvous cherché à transmettre un message d’encouragement aux PME ? I. J. : Non, ce n’était pas mon intention. A la base, je voulais juste divertir le lecteur sans penser à un message en particulier. Mais il est vrai que les PME au Japon sont dans une situation difficile et donc beaucoup de gens ont pensé que La Fusée de Shitamachi était un roman “engagé”. D’ailleurs, on me demande souvent de participer à des séminaires sur les PME. Mais franchement, je n’y connais rien et donc je refuse. L’histoire tient debout, mais si un spécialiste se penche dessus, il va découvrir pleins de choses qui n’ont rien de réalistes, c’est sûr! C’est aussi un roman où l’on...
