
Cette lanterne recouverte de mousse incarne parfaitement le wabi sabi, ce concept d’imperfection qui caractérise le zen. / Angeles Marin Cabello pour Zoom Japon Ces dernières décennies, l’Occident s’est laissé séduire par ce courant de pensée sans toujours en saisir la portée. L’intérêt pour tout ce qui touche au zen a atteint des niveaux sans précédent en Occident. Le terme est utilisé dans des noms de marque pour commercialiser toutes sortes de produits, allant des ordinateurs portables aux matelas. Cherchez des livres sur le zen sur Amazon et vous obtiendrez plus de 50 000 résultats. Le mot lui-même est devenu un synonyme galvaudé d’un état de calme sans stress. Le zen a captivé l’imagination de l’Occident depuis qu’il a été introduit au début du XXe siècle. L’une de ses sommités D.T. Suzuki (1870-1966), qui a donné d’innombrables conférences et écrit plus de 100 livres sur le sujet, dont les incontournables An Introduction to Zen Buddhism (1934) et Zen & Japanese Culture (1938), a été l’un des principaux acteurs de cet engouement.Inspirés par Suzuki, des écrivains occidentaux comme Christmas Humphreys et Alan Watts ont popularisé le zen. Le livre de Humphreys, Zen Buddhism (1949), a été cité par Van Morrison dans sa chanson Cleaning Windows (1982), tandis que L’Esprit du zen (trad. de l’anglais par Marie-Béatrice Jehl, Points, 2005) de Watts a influencé des écrivains de la Beat Generation comme Jack Kerouac et Alan Ginsberg. Le premier a été qualifié de “premier patriarche du bouddhisme en Amérique” par le magazine Tricycle. Son roman classique, Les Clochards célestes (trad. de l’anglais par Marc Saporta, Folio, 1974), respire la passion du zen à chaque page. Dharma (trad. de l’anglais par Pierre Guglielmina, Fayard, 1999) est un recueil de 400 pages des réflexions de Kerouac sur le bouddhisme. A la fin des années 1950, les intellectuels occidentaux, les artistes, les riches philanthropes et de nombreux lecteurs étaient fascinés par le zen, en grande partie grâce aux livres et aux conférences de Suzuki.La popularité naissante du zen a été confirmée par des articles dans des journaux et des magazines tels que le New York Times, le New Yorker, Newsweek et la Chicago Review. Des artistes et des intellectuels aussi divers qu’Aldous Huxley et Dizzie Gillespie ont épousé la voie du zen.L’intérêt pour le zen a fait un bond en avant au cours de la décennie suivante, lorsque toute une génération de jeunes gens a commencé à rechercher de nouvelles philosophies, de nouvelles expériences et un mode de vie plus paisible et plus significatif. En 1968, au beau milieu de cette évolution sismique des mentalités, les Beatles se sont rendus à Rishikesh, en Inde, pour apprendre la méditation. Ce faisant, ils ont sensibilisé des millions de personnes ordinaires au concept de la méditation. Le zen n’était plus réservé à l’élite intellectuelle.Plus récemment, Jon Kabat-Zinn (Au cœur de la tourmente, la pleine conscience, trad. de l’anglais par Claude Maskens J’ai, 2012 ; Où tu vas, tu es, trad. de l’anglais par Yolande Du Luart, J’ai lu, 2013) a contribué à déclencher un nouveau boom du zen, en utilisant le cheval de Troie de la “pleine conscience” pour introduire des techniques adaptées de la méditation zen afin d’aider les personnes souffrant du syndrome de stress post-traumatique et d’autres maladies. Aujourd’hui, la méditation de pleine conscience est pratiquée dans un nombre croissant d’institutions à travers le monde, notamment dans les écoles, les services de police et les multinationales, dont Google, Amazon, Yahoo, Ford et Nike.Le zen est arrivé au Japon à la fin du XIIe siècle, lorsqu’en 1191, le moine Eisai (1141-1215) est revenu de Chine en répandant la nouvelle d’une nouvelle forme de bouddhisme appelée Chan. Il a également rapporté des graines de thé, et c’est donc à lui que l’on doit l’introduction du zen (dérivé du chan) et du thé vert au Japon, deux éléments fondamentaux de la cérémonie du thé japonaise inspirée du zen. Il est...
