
Le jazzman français a trouvé dans l’archipel à la fois l’inspiration et un désir de partager son “savoir-faire”. Depuis 28 ans, Dominique Fillon pianiste compositeur de jazz haut en couleur, nous enchante avec une musique inspirée des rythmes de l'Afrique ou du Brésil. Pourtant c'est au Japon, aux antipodes de ces contrées bouillonnantes, qu'il a choisi de lancer son nouveau projet musical. Né le 25 février 1968 au Mans, Dominique a eu le coup de foudre pour ce pays en 2009. Il y revient régulièrement pour mener divers projets professionnels. Il nous en livre sa vision et nous donne les clés pour comprendre l'attrait des Japonais pour le jazz. Racontez-nous votre découverte du Japon. Dominique Fillon : Je suis venu avec mon épouse, Akemi fin mars 2009 à l'époque des sakura, pour visiter sa famille à Ômiya. Dans cette maison traditionnelle japonaise il faisait si froid - à part dans la cuisine surchauffée - que nous sommes rapidement partis à Tôkyô. Et là, j'ai réalisé que le jazz était partout : dans les combini, les commerces, ... Miles Davis à la trompette. On écoute plus de jazz au Japon qu'ailleurs dans le monde. D'emblée, j'ai été très touché par les gens, si souriants. Il y a ici une véritable culture de l'accueil. Partout on est heureux de vous recevoir – ce qu'on ne ressent pas ailleurs dans le monde – surtout pas en France (rires). En 2011 après le tremblement de terre du Tôhoku, vous vous mobilisez avec votre famille pour venir en aide aux sinistrés. Quelles actions avez-vous menées ? D. F. : Le matin même de l'annonce de la tragédie en France, Akemi, mon épouse violoniste de métier, a composé un morceau pour les sinistrés intitulé Sakura 2011. “Ces notes représentent toutes ces vies qui s'envolent”, m'a-t-elle dit alors. C'était très émouvant. Puis, quelques mois plus tard, je descendais de scène après un concert quand un homme d'affaires m'a proposé de monter un concert de charité à Tôkyô. Il m'a demandé de choisir une cause. J'ai voulu que des musiciens donnent à des musiciens. Nous avons alors décidé d'acheter des instruments pour une école de la région qui avait tout perdu. Le soir du concert, il y avait beaucoup de Japonais, extrêmement dignes – pratiquement toutes les femmes étaient en furisode (kimono de cérémonie). Une des fillettes de l'école de Fukushima est venue pour recevoir le violon symbolique. On a récolté 40 000 euros pour des instruments. Formidable histoire. Le jazz est très apprécié au Japon. Comment peut-on expliquer l'attrait des Japonais pour cette musique, et en particulier pour votre œuvre ? D. F. : Je ne fais pas le jazz qu'ils ont l'habitude d'entendre. Quand les Japonais parlent de jazz, ils pensent à Miles Davis et à d’autres grands noms. Souvent ils aiment cette musique sans la connaître. Ils apprécient son côté esthétique, l'ambiance qu'elle crée sans réaliser vraiment ce qu’elle...
