
S’appuyant sur sa longue expérience, Takeuchi Yukari analyse les perspectives du secteur de l’animation. / Eric Rechsteiner pour Zoom Japon Dans les prochaines années, le secteur de l’animation japonais pourrait connaître une certaine contraction. Quel est l’état actuel de l’animation au Japon, et dans quelle direction va-t-elle ? Zoom Japon a discuté du passé, du présent et du futur de l'anime avec Takeuchi Yukari, PDG de Seven Seas, LLC. Vétéran de l'industrie du divertissement depuis plus de 30 ans, elle est impliquée à de nombreux niveaux de l’animation, de la production à la distribution en passant par les licences et le merchandising.Elle a participé au fameux Comiket, le plus grand rassemblement de la culture pop japonaise, pendant ses études universitaires et a rejoint TMS Entertainment après avoir obtenu son diplôme. TMS est l’un des plus anciens et des plus célèbres studios d’animation japonais, surtout connu pour les séries Lupin III et Anpanman et des films cultes comme Akira. Elle a d’abord travaillé dans le département de production avant de passer au côté commercial des opérations. “J’ai commencé comme assistante de production. A cette époque, TMS, comme Tôei et Tezuka Productions, travaillait beaucoup sur des projets américains, et ils avaient besoin de quelqu’un qui parle anglais. Des sociétés telles que Disney, Warner Bros. et Fox faisaient la pré-production en interne avant de sous-traiter le travail de production proprement dit à des studios japonais, car ils étaient beaucoup moins chers. Quelques superviseurs étaient envoyés au Japon, et une partie de mon travail consistait à les assister en tant que traducteur et interprète”, explique-t-elle. Selon elle, ce fut une expérience bien payée, mais plutôt frustrante pour les animateurs qui ont travaillé sur ces projets, car leurs noms n'apparaissaient jamais au générique.Finalement, lorsque le yen s’est apprécié par rapport au dollar, les sociétés américaines ont commencé à chercher des animateurs encore moins chers à Taïwan, en Corée et même en Chine. Alors que les activités de TMS se développaient, elle a été chargée de gérer tous les contrats de distribution, tant sur le marché intérieur qu'à l'étranger. “Un changement important s’est produit avec l’essor du divertissement vidéo à domicile dans les années 1990. Beaucoup de fans de culture pop ont commencé à acheter des éditions spéciales de vidéos et de DVD comportant des commentaires du réalisateur et des animateurs, des remasters numériques, etc. Cela a rapporté beaucoup d’argent aux studios. Cela a attiré l’attention de nombreux labels de disques comme Avex et King Records. Ces derniers ont alors commencé à sponsoriser et à soutenir les émissions car ils voyaient dans l’animation un moyen idéal pour toucher davantage d’amateurs de musique”, ajoute-t-elle.La nouvelle attention générée par le succès croissant des dessins animés, tant au niveau national qu’international, a attiré des partenaires de toute part, ce qui a finalement conduit à la consolidation du modèle commercial dit de “mix média”, une stratégie dans laquelle de multiples plateformes (télévision, cinéma, jeux vidéo, jouets et produits dérivés, téléphones portables, etc.) travaillent ensemble pour maximiser la pénétration du marché et générer plus de profits. “Ce modèle présente l’avantage de répartir les risques d’investissement entre plusieurs entreprises. Même aujourd’hui, les seules entreprises qui ont suffisamment de puissance financière pour financer un projet à elles seules sont NHK, la chaîne publique, et Netflix”, note Takeuchi Yukari. Cependant, le “mix média” a aussi ses inconvénients, et déjà au début de ce siècle, beaucoup de gens disaient qu’il ne fonctionnait pas bien. “Par exemple, certains consortiums sont composés de dix ou douze sociétés, et il faut toujours valider auprès de chacune d’entre elles avant de prendre une décision. Cela rend les choses assez compliquées. Malheureusement, pour l’instant, c’est la seule façon de produire de nouvelles œuvres” assure-t-elle.Après avoir travaillé pendant 20 ans chez TMS, elle a ensuite rejoint la société de jeux vidéo Sega, où elle a travaillé sur les licences de produits de consommation (peluches, figurines, papeterie), avant d’ouvrir sa propre agence. “Seven Seas est en fait une société personnelle, donc en gros je suis devenue indépendante. Cela me donne plus d’indépendance et la possibilité de travailler pour différents studios et projets en même temps. Par exemple, je m’occupe actuellement des licences de personnages et de marques, et je suis responsable de la gestion des contrats à l’étranger pour Netflix et la Tôhô, le grand studio cinématographique célèbre pour avoir produit Godzilla ou encore Your Name”.En ce qui concerne le marché étranger de l’animation japonaise, elle affirme que...
