L'heure au Japon

Parution dans le n°103 (septembre 2020)

Pour Ishii Masayuki, responsable de la programmation, le cinéma reste une expérience unique. / Eric Rechsteiner pour Zoom Japon Depuis sa création, UPLINK propose aux spectateurs une nouvelle approche pour profiter des films. Shibuya est célèbre dans le monde entier pour sa mode de rue et sa culture jeune et dynamique. Mais il ne faut pas oublier le cinéma. En effet, comme vous le dira tout fan de cinéma japonais, Shibuya est le “cœur des salles indépendantes”. Le réaménagement urbain a radicalement changé le quartier au cours des dix dernières années, et deux ou trois cinémas historiques ont fermé leurs portes. Pourtant, si vous marchez sur les 1,5 km qui séparent le Theater Image Forum du quartier d’Oku-Shibuya, vous pouvez encore trouver sept ou huit petits cinémas. Il se pourrait bien que ce soit le quartier des salles d’art et d’essai le plus dense du monde.C’est ici que l’on trouve l’un des endroits les plus dynamiques de la culture indépendante du pays : UPLINK. Fondé par Asai Takashi en 1987, ce fut d’abord comme société de distribution de films avant l’ouverture de son premier cinéma en 1999, puis le financement de films (en 2016, UPLINK a investi dans Poesía sin fin (Endless Poetry), le film fantastique surréaliste du réalisateur chilien Alejandro Jodorowsky). En 2018, il s’est associé au groupe de grands magasins PARCO pour ouvrir un multiplexe à Kichijôji (voir Zoom Japon n°96, décembre 2019), dans la banlieue ouest de Tôkyô, et en juin dernier, il a ouvert un troisième cinéma à Kyôto.Zoom Japon s’est entretenu du passé et du présent d’UPLINK avec Ishii Masayuki, responsable de la programmation. “J’ai joué au baseball pendant de nombreuses années, comme le réalisateur Richard Linklater”, raconte-t-il. “J’ai même eu la chance d’aller en finale du tournoi national des lycées au stade Kôshien et j’ai continué à jouer à l’université et dans l’équipe de mon entreprise. Mais j’en ai eu assez de ce genre de vie, alors j’ai arrêté et j’ai passé un an en Angleterre. J’y ai découvert l’ICA, le centre d’art moderne. Ça m’a donné envie de travailler dans un environnement similaire où se mêlent le cinéma, la musique et l’art. UPLINK m’a donné cette opportunité.”En effet, si UPLINK est devenu synonyme de cinéma, il trouve ses racines dans le théâtre d’avant-garde. Asai Takashi a travaillé dans la troupe indépendante Tenjô Sajiki de Terayama Shûji en tant que metteur en scène. A la mort de Terayama en 1983 et après la disparition de la compagnie théâtrale, il a créé sa propre troupe, l’éphémère Uplink Theater. Puis, essayant de trouver quelque chose qu’il pourrait faire seul, il a commencé à acheter des droits cinématographiques, distribuant initialement les œuvres du réalisateur anglais Derek Jarman. “Il a vite compris qu’il était difficile de survivre en tant que distributeur”, explique Ishii Masayuki. “Quand on pense au résultat, les cinémas reçoivent la moitié des gains et l’agent de vente un quart, de sorte que le distributeur ne dispose plus que de 25 % de l’argent gagné sur un film. Ce modèle commercial n’est rentable que si vous êtes capable de sortir dix ou vingt titres en un an, ce qui n’est facile pour personne et est encore plus difficile lorsque vous essayez de placer des films d’art et d’essai moins populaires. Les dix premières années ont été très difficiles. Finalement, il a réalisé qu’il était plus logique d’ouvrir son propre cinéma et de garder la plus grande partie des recettes. C’est ainsi qu’en 1999, il a ouvert la première salle de cinéma à Shibuya. En fait, le timing était parfait car c’était les années où le monde du cinéma passait de la pellicule au numérique, ce qui convenait à un petit cinéma comme UPLINK”.Le premier cinéma d'UPLINK se trouve à l’intérieur d’un bâtiment ayant plusieurs autres locataires. C’est un lieu polyvalent avec un café et un restaurant, une galerie,...

Réservé aux abonnés

S'identifier S'abonner

Exit mobile version