L'heure au Japon

Parution dans le n°46 (décembre 2014)

Tout le monde y vient pour voir la fameuse Porte du tonnerre. Mais le quartier réserve d’autres surprises. Situé à l'est de la capitale, Asakusa est l'un des quartiers les plus appréciés de la ville dans la mesure où il a conservé l'esprit populaire de shitamachi, la ville basse. Malheureusement, c'est devenu un haut lieu du tourisme où le commerce a pris le pas sur d'autres considérations et où les visiteurs se rendent pour voir la plupart du temps toujours la même chose. Toutefois, il existe un autre visage d'Asakusa que le spécialiste de l'histoire de la ville Machida Shinobu nous a fait découvrir. Rendez-vous a été pris avec lui un samedi matin ensoleillé. Comme d'habitude, la Porte du tonnerre (Kaminarimon), qui marque l'entrée du temple Sensôji, est noire de monde. Notre guide décide de nous emmener vers l'Asakusa Yomin Bunka Shiryôkan 30-tsubo no Himitsu Kichi ou Musée secret de 100 mètres carrés de la culture populaire d'Asakusa. Cette petite galerie est aussi dingue que son nom peut le laisser entendre. Elle a été ouverte en 2011 par Kudô Yûji, ancien président du très respecté fabricant de jeux Hudson. Machida Shinobu, qui en est le conservateur honoraire, nous explique que Kudô a décidé à l'âge de 50 ans de vendre ses parts de l'entreprise à son frère pour créer ce lieu atypique. "Il aime vraiment Asakusa. Il a donc consacré 150 millions de yens pour établir ce musée qui n'est qu'un simple passe-temps pour lui", confie-t-il. L'établissement est ouvert toute l'année et les collections qui y sont présentées changent tous les trois mois. Le jour où nous l'avons visité, l'endroit était rempli de vieux lecteurs de cassettes dont une grande partie appartient à l'un des amis de Machida. "C'est le plus grand collectionneur du monde", dit avec enthousiasme Machida Shinobu. "Il possède non seulement près de 2 000 lecteurs de cassettes, mais il a aussi des téléviseurs, des machines à laver, des tas d'appareils électriques qu'il bricole lui-même". Certains des appareils présentés possédaient un mini-téléviseur intégré ou un petit clavier de piano. Nous avons même pu voir un Aiwa TPR-101 de 1968 considéré comme le tout premier lecteur de cassette jamais produit dans le monde. Lorsque Kudô Yûji se présente, il nous raconte comment il a conçu son musée. "Je suis très intéressé par l'histoire de Tôkyô, en particulier sa culture populaire", explique-t-il. "Les gens viennent principalement à Asakusa pour respirer cette atmosphère un peu rétro qui y règne. Voilà pourquoi j'ai voulu présenter mes collections et celles des autres". Kudô est également le propriétaire d'un cabaret restaurant situé à proximité de son musée. Dans l'entrée, on trouve des objets anciens, notamment plusieurs dioramas réalisés par Yamamoto Takaki qui décrivent le quartier à l'ère Meiji (1868-1912) ainsi qu'une douzaine d'affiches publicitaires anciennes appartenant à l'impressionnante collection de Kudô composée de 300 objets d'époque. La plus rare du lot est une affiche de Glico dont la valeur dépasse les 300 000 yens sur le marché. Après avoir quitté Kudô, nous nous dirigeons vers un petit restaurant propriété de Yatsume Seiyaku, un spécialiste de médecine chinoise, où nous avons prévu de goûter la fameuse anguille Yatsume. "Ce n'est pas aussi bon que ça", nous glisse Kudô avant de partir. "Je me souviens quand j'étais gamin que personne ne voulait en manger. L'anguille servait surtout comme ingrédient dans les médicaments". A notre arrivée sur place, nous sommes accueillis par Kaiji Shôtarô, le président de Yatsume Seiyaku, et Ôshima Yûko en charge de sa communication extérieure. Elle nous explique que l'entreprise a été fondée à l'ère Meiji et que c'est le seul endroit au Japon où l'on peut goûter l'anguille Yatsume. Apparemment nous sommes les premiers Occidentaux à le faire. On nous propose une assiette de kabayaki (anguille grillée dans une sauce à base de soja). Nous devons reconnaître que l’anguille est particulièrement savoureuse en dépit de la mauvaise publicité que nous en fait Kudô. Puis Kaiji Shôtarô pose sur la table ce qui ressemble à des pierres dorées. "Il s'agit en fait de vitamines composées selon la tradition médicinale chinoise....

Réservé aux abonnés

S'identifier S'abonner

Exit mobile version