L'heure au Japon


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Parution dans le n°111 (juin 2021)

Il ne reste plus aujourd’hui qu’une vingtaine de geishas dans ce quartier qui en comptait près de 600 dans les années 1930. / Eric Rechsteiner pour Zoom Japon Il est l’un des derniers quartiers de la capitale à avoir résisté aux changements liés à la modernisation de la capitale. Dans un Tôkyô en constante évolution, les quelques vestiges du passé sont rasés au bulldozer pour faire place à de nouvelles structures en acier et en verre. Cependant, il existe un endroit au cœur de la ville où la tradition est encore valorisée. Bienvenue à Kagurazaka.Pendant la période d’Edo (1603-1868), ce quartier relativement petit était situé juste à la limite des douves extérieures du château d’Edo et s’est rapidement imposé comme un quartier de divertissement avec de nombreuses maisons de geishas et des restaurants. Certains de ces établissements ont survécu aux nombreux changements et tragédies qu’a connus la ville au cours des quatre cents dernières années, et leur présence imprègne la culture et l’atmosphère du quartier.Kagurazaka est divisé en deux par la rue homonyme de 500 mètres qui, depuis la gare d’Iidabashi, grimpe la colline sur laquelle elle a été construite. La rue elle-même attire beaucoup de visiteurs occasionnels et de touristes. C’est aussi l’un des endroits les moins intéressants du quartier, car de nombreux magasins et restaurants locaux ont été remplacés par les habituels fast-foods, chaînes de restaurants et cafés que l’on trouve partout ailleurs.Une caractéristique curieuse de cette rue est qu’il s’agit d’une “artère à sens unique alterné”, ce qui signifie que le matin, le trafic automobile se déroule vers le bas alors que l’après-midi, il change de sens. Elle est également complètement fermée à la circulation entre 12 h et 13 h, et de 12 h à 19 h les dimanches et jours fériés. Ce système a été mis en place en 1956, à une époque où la rue n’avait pas de trottoirs et où les gens se plaignaient du danger qu’il y avait à négocier la pente étroite dans une circulation intense à double sens. Selon la légende urbaine, ce schéma alternatif particulier a été conçu pour favoriser le puissant politicien (et futur Premier ministre) Tanaka Kakuei, qui faisait quotidiennement la navette entre sa maison de Mejiro et le Parlement ou le quartier des ministères dans le centre-ville.Les curiosités historiques mises à part, le véritable cœur de Kagurazaka se cache dans le dédale de ruelles sinueuses et d’escaliers étroits de part et d’autre de la pente, où le kagai ou hanamachi (“quartier des fleurs”, c'est-à-dire celui des geishas) continue de vaquer tranquillement à ses occupations, la plupart du temps à l’insu des passants. En montant la pente, prenons la deuxième rue à gauche. Nous arrivons rapidement à Atami-yu, un bain public qui était autrefois une sorte de lieu de rencontre pour la communauté très soudée des personnes qui vivaient et travaillaient dans le quartier. Dans les années 1950, selon le propriétaire, environ 200 geishas s’y rendaient chaque jour, lorsque Kagurazaka était l’un des nombreux centres de divertissement florissants de Tôkyô et que les bains privés étaient un luxe rare. C’est à cette époque que la geisha Kagurazaka Hanko, devenue chanteuse, a connu un grand succès avec la chanson Geisha Warutsu (Geisha Waltz).Atami-yu est stratégiquement situé au pied du pittoresque escalier Atami-yu Kaidan, également appelé Geisha kôji (ruelle des geishas), car il relie le bain public au Kenban où s’exercent les geishas. Ce bâtiment anodin de deux étages abrite également le bureau qui gère le travail des geishas et sert d’intermédiaire entre les maisons de geishas et les ryôtei (restaurants traditionnels) où elles rencontrent leurs clients. Le kagai de Kagurazaka a été créé en 1857 et, grâce à sa proximité avec les centres politiques et économiques de la ville, il est devenu le premier quartier de divertissement du centre-ville, au point d’être connu sous le nom de Yamanote Ginza. Par miracle, les établissements locaux sont tous sortis presque indemnes du grand tremblement de terre qui a frappé la capitale en 1923. Dans les années 1930, quelque 600 geishas travaillaient pour 150 ryôtei. Kagurazaka se distingue par ses ruelles pavées où l’on peut facilement se perdre. / Eric Rechsteiner pour Zoom Japon C’était une époque où l’on entendait partout le son du shamisen et, après le coucher du soleil, les rues étaient pleines de personnes qui vivaient dans les résidences voisines. Entre faire du shopping, dîner, aller au cinéma ou assister à une représentation théâtrale, Kagurazaka était alors synonyme de plaisir.Selon Sakurai Shin'ichirô, ancien président de l’Association Kagurazaka, le quartier est resté actif jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, mais lorsque le cours du conflit s’est dégradé, les geishas ont dû rejoindre des groupes de volontaires et sa famille a dû prêter son ryôtei à une entreprise de construction électrique basée en Mandchourie. Kagurazaka a été rasé par les bombardements aériens américains, mais il a rapidement repris ses activités peu après la guerre. Lorsque Katayama Tetsu, du Parti socialiste, est devenu Premier ministre en 1947, il a ordonné à tous les ryôtei de rester fermés, mais les propriétaires laissaient entrer leurs clients par la porte arrière.Finalement, le monde des geishas s'est avéré plus résistant que le gouvernement (probablement parce que les ryôtei offraient à de nombreux politiciens et entrepreneurs un lieu discret où ils pouvaient tenir leurs réunions de haut niveau) et, dans les années de forte croissance économique, le quartier a retrouvé son apogée d’avant-guerre. Pourtant, au début des années 1960, on ne comptait plus que 250 geishas et qu’une cinquantaine de ryôtei. De nos jours, il ne reste qu’une poignée de geishas (il y en avait 18 en 2016, ...

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