L'heure au Japon

Parution dans le n°40 (mai 2014)

Beaucoup moins connue que Naoshima, la petite île de la mer Intérieure réserve de bien belles surprises. Depuis plusieurs années, les amateurs d’art contemporain qui se rendent au Japon font un crochet quand ils le peuvent à Naoshima. Cette île de la mer Intérieure est devenue le symbole de la capacité à transformer un lieu industriel en perdition en un centre artistique de premier plan grâce à la collaboration de grands architectes et artistes réunis par le groupe Benesse. Depuis 20 ans, Naoshima est sortie de l’anonymat et s’est transformée en un espace à haute valeur artistique. Les constructions de Andô Tadao dont l’étonnant musée Chichû (Chichû bijutsukan) ont contribué à mettre en gras le nom de Naoshima sur les cartes de la région et dans les guides touristiques. La création du festival international d’art, Setouchi Triennale, en 2010 lui a donné une nouvelle dimension à travers le monde. A tel point que les visiteurs étrangers se pressent pour aller découvrir les œuvres de Kusama Yayoi ou le sanctuaire revisité par Sugimoto Hiroshi. Les Français ne sont pas les derniers à s’y précipiter puisqu’ils représentent la seconde population de touristes étrangers dans cette partie du Japon. De quoi ravir les autorités locales de Shikoku dont dépend l’île même si elles regrettent que le succès de Naoshima ne soit pas assez associé à leur région. C’est la raison pour laquelle ils s’efforcent de corriger cette réalité, en rappelant que Shikoku ne se résume pas qu’à Naoshima. En effet, d’autres îles moins connues que Naoshima ont bénéficié ces dernières années de la bienveillance du groupe Benesse, dont l’un des credo est “d’utiliser ce qui existe pour créer ce qui sera”, a ainsi pris pied sur l’île de Teshima en 2010 pour poursuivre sa mission visant à trasnformer un lieu sur le déclin - la population étant passée de 2 700 âmes à à peine 1 000 - en un pôle dynamique capable de ramener la vie. Au terme de trois années de présence, on peut dire, sans exagérer, que la petite île située entre Naoshima et Shôdoshima a repris des couleurs. Des couleurs vives même comme celles que le graphiste Yokoo Tadanori a utilisées dans la maison qui lui a été confiée et qui a été ouverte en juillet 2013. Implantée à deux pas du port d’Ieura, la Teshima Yokoo House est un petit bijou, fruit de la collaboration entre le plasticien et l’architecte Nagayama Yûko. Cette dernière a rénové une ancienne demeure construite face au port, en respectant la disposition originale des bâtiments mais en y ajoutant des éléments comme cette tour cylindrique dans laquelle l’artiste invite le visiteur à se perdre au milieu de centaines d’images de cascades. Une sensation de vide sidéral saisit la personne qui se retrouve dans ce petit espace sans fin rendu possible par un subtil jeu de miroirs. Dans d’autres lieux de la maison, c’est au contraire l’impression de confinement qui domine. Le petit grenier plongé dans la pénombre où une toile dominée par le violet figure un œuf prêt à exploser devant des individus effrayés en est une belle illustration. Ailleurs dans la maison, le jeu de la lumière apporte d’autres sensations par rapport à l’espace. Le rouge domine dans d’autres parties de la maison. De loin, cela peut donner la sensation d’un univers apocalyptique, mais il n’en est rien. Yokoo Tadanori montre que l’art est salvateur. Ses toiles multicolores éclatent au grand jour grâce à...

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