Vingt-trois autres exploitations de la ville de Saito proposent cette solution d’hébergement, au plus près de la population locale. “Si les visiteurs le souhaitent et sont intéressés, nous leur proposons de les emmener avec nous dans le champ pour qu’ils puissent voir le travail de la ferme de leurs propres yeux, complète Junko. Nous organisons aussi des ateliers pour que les gens puissent apprendre à confectionner leur propre miso ou des umeboshi, des prunes salées dégustées comme condiments avec du riz.” L’un des aliments de bases du repas japonais (voir Zoom Japon n°54, octobre 2015).
A cette heure de la matinée, l’époux de Junko est encore dans les champs et il y restera toute la journée. Lorsqu’il ne travaille pas dans sa propre exploitation, il fait “des petits boulots agricoles pour aider les autres fermiers du coin dans leurs propres travaux”. A Saito, on cultive aussi du riz, des agrumes comme le yuzu, mais aussi la mangue. A partir des produits du jardin, Junko confectionne toutes sortes d’aliments comme les umeboshi, l’alcool de prunes umeshu, le jus de shiso qui sont pour certains vendus ensuite dans les restaurants environnants.
En plus de ses beaux-parents, elle s’occupe aussi de ses nombreux animaux. La ferme de Junko est une vraie ménagerie. Son chien, Warabi, jappe joyeusement à chaque mouvement de la maison et joue avec les lapins tandis que la chèvre reste dans le jardin. Le soir, elle sort son vivarium rempli de kabutomushi, sorte de gros scarabées que les petits enfants japonais aiment ramasser l’été dans les campagnes afin de les observer. “L’insecte que je préfère reste la luciole, confie Junko. Il y en a beaucoup dans la région et à certains moments de l’année, on peut les observer. C’est toujours magique.” Le soir, après être retournée au champ et pris son dîner, elle aime aussi se rendre à la source thermale d’eau chaude toute proche. Le bain est “le meilleur remède pour se détendre et se relaxer des efforts de la journée”, s’enthousiasme-t-elle. L’occasion aussi de retrouver les copines qui s’y donnent régulièrement rendez-vous.
Dans la pièce principale de la ferme, entièrement en tatamis où trônent les portraits des ancêtres, les murs sont recouverts de dizaines de photos de famille. Certains clichés relatent des événements récents, d’autres témoignent d’une vie passée dans cette belle ferme pleine d’histoire et de vie, bâtie il y a près de 96 ans. “Là, c’est grand-mère quand elle était jeune. Elle était belle n’est-ce-pas ?” Des images jaunies qui retracent des pans de vie, rythmés par les cultures, le travail de la terre et les fêtes au village.
Le respect de la nature est également primordial pour Kuroki Shinsaku. A seulement 30 ans, il gère la distillerie de shôchû, Kuroki Honten, à une vingtaine de kilomètres à l’ouest de Saito, dans la petite ville de Takanabe. Le shôchû est une boisson alcoolisée, particulièrement prisée dans le sud du pays. Elle est confectionnée à partir de patates douces, de blé ou même parfois de riz : sa popularité a grimpé en flèche ces dernières années, supplantant le saké dans le cœur des Japonais. Le shôchû peut se boire avec des glaçons, avec de l’eau pétillante, de l’eau chaude ou, comme l’aiment les gens de Kyûshû, accompagné de kabosu, un petit citron vert local. “L’avantage de cette boisson est qu’elle se marie très bien avec toutes sortes d’aliments, explique Kuroki Shinsaku. Selon la composition du shôchû (blé, patates douces, riz), il sera plus ou moins fort et sera davantage en harmonie avec la viande, en particulier avec le fameux bœuf de la région, s’il est corsé, ou avec le poisson cru, pour les crus plus légers.” La spécialité de la maison est le Kogane sengan produit à base de patates douces cultivées directement sur les 43 hectares de la distillerie.