Nakamura Fuminori s’intéresse au monde qui l’entoure. Il n’hésite pas à le faire savoir et à l’affronter. Reconnu pour son talent au Japon comme dans d’autres pays, Nakamura Fuminori est un observateur attentif de la société au sein de laquelle il entend remplir un rôle actif. Il se sent responsable et il n’entend pas rester inactif face aux défis que son pays est en train de connaître. La menace terroriste ne vous a pas empêché de venir en France ? Nakamura Fuminori : Je ne pense pas que le fait d’être en France soit plus risqué. La situation est identique au Japon où il se passe aussi des événements inquiétants, sauf que cela n’a rien à voir avec la religion. Pour préparer cette interview, j’ai acheté deux de vos livres en version numérique : Pickpocket et L'hiver dernier, je me suis séparé de toi. Le numérique ne vous fait-il pas peur ? N. F. : A vrai dire, je suis contre. J’ai fait arrêter la publication en numérique au Japon et je ne l’accepte plus. Il n’en existe que deux ou trois, je pense. Mais je l’accepte en dehors de l’archipel, car il y a de moins en moins de librairies dans les pays étrangers. J’ai commencé à l'accepter pour la version anglaise, en pensant surtout aux Etats-Unis et à leur vaste territoire qui oblige leurs citoyens à faire des heures de conduite pour se rendre dans une librairie. C’est bien différent du Japon où elles sont très nombreuses. De plus, je veux soutenir des librairies physiques. J’estime aussi que notre cerveau ne fonctionne pas de la même manière lorsqu’on lit sur papier ou sur écran. Je préfère la première forme. Je trouve que vous avez un style d’écriture qui rappelle un peu Mishima Yukio ou Dazai Osamu. Comment l’expliquez-vous ? N. F. : Les sujets sont très personnels. Au fond, je ne suis pas quelqu’un de gai. Quand j’étais au lycée, à une époque où je ne pouvais plus m'y rendre, j’ai découvert La déchéance d'un homme de Dazai Osamu. Comme ses autres fans, je me suis retrouvé dans le personnage principal. C’est après cette lecture que je suis devenu un grand lecteur. A cette période, j’avais déjà l’habitude de noter quotidiennement mes tourments. Même si je n’avais aucune ambition de devenir écrivain, mes notes avaient pris la forme d’une poésie ou d’un conte. Une fois à l’université au lieu de chercher un emploi comme mes camarades, je me suis mis à rédiger un roman et j’ai trouvé une évidence en moi-même. Comme je n’avais qu’une vie à vivre, tant qu’à faire, j’ai décidé d’essayer de devenir écrivain ! Cela ne vous gêne pas d’exposer au public votre intimité ? N. F. : En évitant de le faire, on ne peut pas devenir écrivain. C’est d’autant...