Le succès de l’organisation s’explique par sa capacité à toucher le plus grand nombre, s’inquiète Nakano Kôichi. Est-ce que la Nippon Kaigi représente une menace pour la société japonaise ? Telle est la question que Zoom Japon a posée à Nakano Kôichi, professeur de sciences-politiques à l’Université Sophia de Tôkyô. Selon vous, quel est l’élément le plus dangereux de la Nippon Kaigi ? Quelles sont ses activités les plus troublantes à vos yeux ? Nakano Kôichi : Il y a d’abord la glorification du passé. Pas tant le passé lointain que la période de la dernière guerre. Pour être un peu plus concret, je dirais qu’elle glorifie la trajectoire du Japon moderne allant de 1868 à la guerre. Son point de vue sur la colonisation et la politique d’agression, mais aussi sur l’ordre social d'avant-guerre – un mélange d’héritage féodal et de valeurs modernes – est influencé par une forte tendance autoritaire qui imprègne tous les aspects de la vie sociale et politique, allant de l'éducation à la relation entre l’État et la société. Je trouve cela très problématique. Par ailleurs, en plus de ses tendances idéologiques, elle constitue un réseau qui rassemble des politiciens puissants, des organisations médiatiques, des groupes religieux et certains leaders d’opinion et des célébrités. Ils partagent tous une sorte de nostalgie, à l’instar d’un Donald Trump dont l’objectif est de rendre à l’Amérique sa grandeur. Les gens qui gravitent autour de la Nippon Kaigi disent la même chose concernant le Japon. Pire encore, ils veulent ramener le Japon dans le passé, comme ils l’ont exprimé dans leur manifeste de 2012. L'un des buts avoués de la Nippon Kaigi est de préserver le “caractère national beau et traditionnel” du Japon. C’est une déclaration à laquelle la plupart des gens pourraient adhérer. N. K. : C’est en effet un point intéressant. Ils parlent de tradition, mais en réalité ils évoquent la tradition récente. Il ne s’agit pas des époques de Nara ou de...