Les Japonais n’ont jamais manifesté de réticences vis-à-vis des androïdes. Ils vont même les voir au théâtre.
Elle se nomme Gemenoid F, un nom pas très facile à porter, mais elle ne s’en plaindra pas. Elle n’a pas été programmée pour cela. Gemenoid F est un androïde dont l’expression a été jugée suffisamment bonne pour être digne de figurer à l’affiche de la pièce de théâtre Sayonara présentée à Tokyo les 10 et 11 novembre dernier. Même si elle ne tenait pas le rôle principal, elle a tout de même retenu l’attention du public qui a pu l’entendre réciter de la poésie à un malade en phase terminale. L’assistance n’a pas été choquée de voir un robot prendre la place d’un être humain, comprenant sans doute que leur futur proche serait peuplé de ces machines à l’apparence humaine capables de remplir des fonctions plus ou moins compliquées.
Rappelons-le, le Japon est déjà le pays des robots. On en compte 295 pour 10 000 salariés, soit dix fois plus que la moyenne mondiale. La plupart d’entre eux sont des machines industrielles qui effectuent des tâches répétitives, soulageant ainsi une main-d’œuvre qui peut ainsi se concentrer sur d’autres domaines. Les robots humanoïdes sont bien sûr plus rares et Gemenoid F fait encore figure d’exception dans le paysage robotique nippon. Toutefois, ils sont de plus en plus nombreux et leurs concepteurs n’hésitent pas à les mettre au travail, histoire de familiariser l’opinion publique à leur présence. Au printemps 2009, les élèves d’une école élémentaire de Tokyo ont fait la connaissance de Saya, une institutrice d’un nouveau genre, que beaucoup d’entre eux ont trouvé “très jolie”. Capable de parler et montrer différentes expressions faciales, Saya a rempli sa principale mission qui était de séduire ce jeune public. Les Japonais investissent d’énormes sommes dans le développement robotique afin de mettre au point des machines à visage humain qui pourront accompagner et soutenir une population vieillissante. La Japan Robot Association estime que les premiers robots “intelligents” seront commercialisés en 2015, c’est-à-dire demain, et que dix ans plus tard, ils seront pleinement intégrés à la vie quotidienne. Au-delà du marché potentiel qu’ils représentent, les robots humanoïdes constituent un enjeu considérable de société et accessoirement un élément intéressant de promotion de la technologie japonaise à l’étranger. Lors du sommet de l’APEC qui a eu lieu à Yokohama à la mi-novembre, les organisateurs ont choisi de mettre en avant Mim, un robot humanoïde capable de danser et de chanter, au milieu d’un vaste espace consacré à l’innovation technologique japonaise. Si certains en doutaient encore, Gemenoid F, Saya, Mim et les autres montrent que le Japon en a encore sous le capot.
Gabriel Bernard