Je rêvais de ne plus avoir à offrir des chocolats aux hommes le jour de la St-Valentin (c’est comme ça au Japon !). On m’avait dit qu’en France c’était les hommes qui offraient des cadeaux à leur chérie. Je m’attendais à ce qu’un bel homme dynamique me donne un bouquet de roses avec des mots d’amour, et à vivre une belle histoire d’amour sans me fatiguer. En effet, les rencontres ne manquent pas en France. Dans la rue, on me dit « ni hao » au moins trois fois par jour. Je ne sais jamais quoi répondre. Sinon, où que j’aille il y a toujours quelqu’un d’étrange qui vient me demander d’où je viens. Me drague-t-il ? Je l’ignore, mais comme ce n’est pas toujours évident à deviner je lui réponds par politesse. Dès que je lui parle de mon origine, il m’explique combien il est sincère car il respecte l’esprit japonais. Sans oser le couper, plus je l’écoute, plus je suis persuadée qu’il parle au reflet de son fantasme. Ça me donne envie de lui dire que je suis Chinoise et de m’en aller vite.
A part ça, les hommes dynamiques je peux les trouver dans les bars. Si je leur parle ils ne perdent pas de temps, ils sont clairs et efficaces pour atteindre leur but : passer quelques nuits agréables avec une femme de passage, pas plus. Même combat qu’au Japon, sauf que les Japonais gèrent la nuit avec du saké ou de l’argent, les Français avec des paroles. Ces derniers maîtrisent tous les mots tendres possibles comme si tout était vrai, et après font comme si de rien n’était. Quand ça se passe comme ça avec une Japonaise nouvelle en France ne connaissant pas les règles du jeu, elle passe des jours à se poser la question : il m’a lâchée ? Pourtant il m’a dit dix fois “Que tu es belle !” comme dans une chanson que j’aime bien, Caramels, bonbons et chocolats… Aujourd’hui, je vis avec mon compagnon qui ne dit pas de mots d’amour et m’offre des fleurs en pot que je laisse mourir chaque fois à contre-cœur. Ça le déçoit. En définitive, peut-être vaudrait-il mieux s’offrir chacun ses chocolats.
Koga Ritsuko