Au large de Hiroshima, le site classé au Patrimoine mondial de l’Unesco vous transformera en enragé de la photographie.
En choisissant de consacrer l’article principal de la rubrique à Miyajima, une des premières questions qui s’est posée était de savoir quelle photo serait la meilleure en ouverture. Autant le dire tout de suite, le choix n’a pas été facile tant cette île située en face de Hiroshima est photogénique. Même le plus mauvais des photographes sera en mesure de réaliser au moins un cliché décent comme si les dieux qui protègent le lieu souhaitaient qu’on en revienne avec une trace photographique digne de ce nom. Miyajima est, en effet, un lieu sacré du shintoïsme que les Japonais fréquentent depuis des siècles bien avant que le tourisme de masse ne le transforme en un vaste magasin de souvenirs à ciel ouvert. Comme le veut la religion shintoïste, un espace sacré est identifié par la présence d’un torii, portique qui marque de façon symbolique la séparation entre le monde physique et le monde spirituel. Celui de Miyajima est inmanquable compte tenu de sa dimension et de sa position dans la mer. Voilà pourquoi, cette photo de ce magnifique torii s’est imposée à nous pour illustrer le début de cet article. C’était aussi une manière très symbolique pour nous de vous entraîner dans la visite de ce lieu inscrit au Patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1996. Même si vous ne disposiez pas de temps pour voir autre chose sur l’île, la simple vue de ce torii impressionnant justifierait le déplacement. Lorsque la mer est haute, il donne l’impression de flotter. C’est tout bonnement divin. Que dire alors du sanctuaire d’Itsukushima (6 h 30-18 h, 300 yens) situé juste derrière ce portail géant. Bâti sur pilotis, ce magnifique bâtiment avance lui aussi dans la mer qui le transforme à marée haute en une sorte de grand bateau rouge oranger qui contraste avec les teintes foncées de l’eau. Pour peu que le soleil darde ses rayons sur ce vaste édifice, vous aurez de quoi remplir tout un album de photos, en ne vous concentrant que sur lui. Tout son attrait repose sur son architecture sobre qui se fond parfaitement dans son environnement naturel. Il aurait été fondé en 593, mais la plupart des édifices qui le composent ont été construits six cents ans plus tard par Taira no Kiyomori qui fut gouverneur de la région. On comprend aisément pourquoi il a choisi ce lieu pour bâtir cet ensemble dont aujourd’hui encore on ne se lasse pas. Les visiteurs sont en effet très nombreux. Ils arrivent par ferry depuis Hiroshima après une courte croisière sur les eaux calmes de la mer intérieure. La symbiose entre les éléments contribuent aussi à donner au lieu sa magnificence que certains n’hésitent pas à rapprocher du Mont-Saint-Michel. D’ailleurs, les deux sites sont jumelés et le visiteur l’apprend dès son arrivée au terminal. Un peu plus loin, lorsqu’il aura passé le sanctuaire d’Itsukushima, ce même visiteur tombera nez-à-nez avec une boutique sobrement baptisée Saint-Tropez. Il est vrai que le climat de Miyajima rappelle plus celui de la Côte d’Azur que celui de la côte normande. Mais c’est le seul point commun entre les deux régions, car, malgré ses charmes et son histoire, Saint-Tropez ne peut guère rivaliser avec la beauté ensorcelante de l’île japonaise. Comme c’est souvent le cas dans l’archipel, le printemps et l’automne sont les deux saisons les plus favorables pour se rendre à Miyajima. Les températures sont clémentes, les précipitations assez rares et le ciel souvent d’un bleu azur fait ressortir le vermillon des édifices sacrés. Mais c’est en été qu’a lieu le festival Kangensai qui rend hommage à la musique sacrée avec notamment un défilé de bateaux décorés sous l’imposant torii de 16 m de haut. Ce festival a lieu entre fin juillet et début août en fonction du calendrier lunaire, car il a été fixé au 17 juin du dit calendrier.
Bien qu’à certains courts moments de son histoire, l’île fût considérée comme un lieu de résidence, elle reste encore aujourd’hui un espace sacré où l’on peut assister à des cérémonies comme des mariages célébrés selon le rite shintoïste. Le sanctuaire est dédié aux trois filles du dieu Susanoo dont l’aînée, Itsukushima, est la déesse de la mer. Il porte donc bien son nom et sans doute cette dernière, ravie d’avoir vu son patronyme donné à ce bel édifice, en assure la protection. S’étendant sur plusieurs dizaines de mètres, le sanctuaire est composé de plusieurs bâtiments reliés entre eux par des pontons et des galeries couvertes qui incitent le visiteur à tourner invariablement la tête vers la mer et le torii si majestueux. Quand on se trouve à une certaine distance, on se rend compte de sa grandeur, notamment à marée basse lorsque des centaines de personnes s’approchent de lui pour le photographier et y déposer quelques pièces de monnaie après avoir fait un vœu.
Une fois le sanctuaire passé, il est possible de faire marche arrière et retourner vers le terminal où, sur votre chemin, vous rencontrerez des daims en liberté (comme à Nara) peu farouches et toujours prêts à grignoter quelque chose. D’ailleurs, faites attention à eux, car ils adorent le papier. Toutefois, il est préférable de poursuivre la visite de l’île. Il sera toujours temps de retrouver ces quadrupèdes gourmands. En effet, dans la continuité du sanctuaire d’Itsukushima, se trouve un petit sentier qui mène au temple bouddhiste de Daishô-in. La montée vers ce nouvel édifice religieux est bordée de très nombreuses statues dont les expressions parfois étonnantes réjouiront aussi les amateurs de photographie. Prenez le temps de cette petite ascension qui vous conduira jusqu’à la terrasse qui offre une très belle vue panoramique sur l’île. Pour peu qu’un moine interprète ses prières au son du tambour, vous vivrez un moment assez unique dans un cadre réellement envoûtant. Dites-vous cependant qu’il ne s’agit que d’un hors-d’œuvre, certes copieux et suffisant pour un touriste raisonnable. Il y a aussi le plat de résistance : l’ascension du mont Misen, point culminant de l’île, que l’on atteint en téléphérique (9 h-17 h, 1000 yens l’aller simple, 1800 yens l’aller-retour). Il faut une vingtaine de minutes pour rejoindre le point de départ du téléphérique, mais sachez que vous ne serez pas les seuls à vouloir profiter de la magnifique vue qu’offre le sommet du mont Misen. On peut compter jusqu’à plus de deux heures d’attente avant d’embarquer pour 15 mn de téléphérique. Aussi est-il préférable de commencer par cette ascension si vous arrivez tôt le matin ou d’y renoncer si vous êtes sur place plus tard dans la journée. L’idéal est de passer la nuit sur l’île afin d’être sur place avant l’arrivée massive des touristes. Plusieurs hôtels sont à votre disposition à des prix variables selon qu’ils offrent ou non une vue sur la mer. Evidemment lorsqu’on se trouve dans un endroit aussi paradisiaque, il convient peut-être de prévoir un budget un peu plus important que dans Hiroshima où l’on peut se contenter d’un hôtel plus ordinaire. Sur Miyajima, parmi les adresses à connaître, on peut citer le Kinsuikan dont les chambres les plus “luxueuses” proposent une vue sur le torii (à partir de 18 000 yens la nuit, dîner et petit-déjeuner compris). Le Miyajima Grand Hotel Arimoto n’est pas mal non plus avec ses 400 ans d’histoire et ses bains extérieurs (à partir de 18 900 yens, dîner et petit-déjeuner compris). Enfin, le Benten no yado Itsukushima dispose notamment d’un bain avec une vue panoramique qui justifie son prix sans oublier sa cuisine délicieuse qui met en valeur les huîtres produites localement (à partir de 15 750 yens, dîner et petit-déjeuner compris). Voilà bien d’autres occasions de faire de superbes photos au coucher ou au lever du soleil.
Gabriel Bernard
S’y rendre :
Selon l’endroit d’où vous partez, il faut compter 10 mn (Gare de Miyajimaguchi), 32 mn (port de Hiroshima) ou 45 mn (Parc de la paix) de bateau.
A noter :
Le 19 mars à 19 h, une conférence sur la région de Hiroshima sera organisée à l’Ecole Yutaka (7 rue Charles-François Dupuy 75003 Paris). Entrée libre.
Réservation : hiroshima@destinationjapon.fr