Les amateurs de cinéma japonais peuvent se réjouir de la sortie de plusieurs films qui méritent de figurer dans leur dvdthèque.
On se lamente souvent de moins voir de films japonais dans les salles obscures de l’Hexagone. Il faut dire que la plupart des distributeurs français font depuis quelques années la fine bouche devant la production nippone et c’est bien dommage. On peut néanmoins saluer le travail d’une petite poignée de sociétés qui se démènent pour proposer des œuvres made in Japan récentes ou anciennes. C’est le cas notamment de Choses vues qui, avec la collaboration de Comme des cinémas, travaille à la mise en valeur des réalisations méconnues du grand cinéaste Imamura Shôhei. Après avoir fait l’effort de les proposer en salles l’année dernière, la société sort aujourd’hui en DVD En suivant ces soldats qui ne sont pas revenus, une série de documentaires portant sur les soldats de l’armée impériale qui ont choisi de ne pas rentrer au pays après la Seconde Guerre mondiale. Comme il l’avait déjà prouvé avec L’Evaporation de l’homme portant sur ces individus qui du jour au lendemain disparaissent dans la nature pour refaire leur vie, Imamura était non seulement un grand cinéaste de fiction, mais aussi un documentariste hors pair capable de montrer du doigt des sujets parfois dérangeants dans une société entièrement fondée sur le consensus. Dans le Japon d’après-guerre, l’idée même qu’il puisse y avoir des soldats restés de leur plein gré à l’étranger plutôt que d’être revenus dans la mère patrie était tellement ancrée que le terme les désignant - mikikanhei - était prohibé par les autorités. Faisant fi de ce refus d’accepter cette réalité, le réalisateur, récompensé par deux Palmes d’or à Cannes, est parti sur les traces de ces hommes pour tenter de comprendre leur cheminement. Evidemment dérangeants, ces documentaires ont très peu été vus au Japon. Voilà pourquoi il ne faut pas manquer l’occasion de se procurer ces films dont la valeur historique est immense. Ils permettent de mettre un bémol dans la façon qu’ont les autorités à présenter les événements de la dernière guerre.
Dans un autre registre historique, celui-là bien moins polémique, Carlotta a ressorti en version restaurée Harakiri (Seppuku, 1962) de Kobayashi Masaki sans doute le plus beau film de sabre jamais tourné jusqu’à nos jours. Le cinéaste prend à l’époque bien des risques pour tourner ce film qui dénonce le mode de fonctionnement de la classe des samouraïs. D’une esthétique quasi parfaite et d’une grande audace en termes de réalisation, Harakiri reste un modèle du genre que l’on a souvent voulu copier sans y parvenir. Le dernier réalisateur en date à s’être lancé dans l’aventure est Miike Takashi avec Hara-kiri, mort d’un samouraï. Le réalisateur, qui est capable du pire comme du meilleur, offre un travail soigné, mais qui manque de profondeur et de tension dramatique. Saya Zamuraï de Matsumoto Hitoshi en est pour sa part pourvu. Sorti au printemps, ce long métrage aborde de façon originale la condition des samouraïs. A la fois drôle et poignant, le film figure parmi les très bonnes surprises de l’année 2012. Urban distribution le sort en DVD dans un coffret comprenant deux autres de ses longs métrages (Symbol et Big Man Japan). A se procurer d’urgence.
Odaira Namihei
Références :
En suivant ces soldats qui ne sont pas revenus, de Imamura Shôhei, Choses vues, 18€
L’évaporation de l’homme, de Imamura Shôhei, Choses vues, 15,50€
Harakiri, de Kobayashi Masaki, Carlotta, 14,99€
Hara-kiri, mort d’un samouraï, de Miike Takashi, Bodega, 19,99€
Coffret Matsumoto Hitoshi, Urban, 29,99€