Je rêvais de vivre en France et de plonger dans la culture française pour être plus proche de ses citoyens. Avant de m’installer “définitivement” ici, je donnais des cours de français aux Japonais dans ma région, j’organisais des événements franco-japonais et je publiais même un journal gratuit sur la France. Voilà, à l’époque mon cœur vivait déjà dans ce pays tandis que mon corps restait dans l’archipel. Une situation qui me déchirait en deux. Depuis que je vis en France je trouve une certaine cohérence avec moi-même, malgré un millier d’inconvénients qui se font jour sans cesse. C’est ici, comme je le souhaitais, que j’ai achevé mes études, que je me suis mariée, que j’ai trouvé le travail dont j’avais rêvé, et en option que j’ai appris à être très patiente.
Jusque-là, on dirait que j’ai eu tout ce que je désirais. Pourtant, je me rends compte qu’il me manque des choses importantes. A force de m’être trop consacrée à avoir une position dans cette société, je n’ai pas pris le temps de savourer le plaisir de la vie française. Ce n’était finalement que l’attitude française que j’ai acquise et pas sa culture, ni son style de vie. Enfin, j’ai décidé de faire des efforts pour alimenter ma parisiennité. Ces derniers temps, j’ai acheté pour la première fois un poulet rôti dans une boucherie d’un quartier parisien et je suis allée au musée un samedi matin ! Ce n’est pas tout. De ma poche, je me suis même permise de prendre un café à 4€ sur une terrasse près de la Concorde ! Assise, dans le froid de l’automne, je regardais les touristes passer et les feuilles tomber. Perdue dans mes pensées, je me suis souvenu d’un après-midi où j’ai été draguée par un vieil artiste à cette même terrasse. Il m’a invitée chez lui pour un café et je me suis retrouvée dans son salon où la porte de sa chambre était grande ouverte sur un lit bien préparé. Voici, avec ma parisiennité passée au niveau supérieur, aujourd’hui, même un café me procure un peu de nostalgie. Il ne me reste plus qu’à perdre mon calme et à râler tout le temps !
Koga Ritsuko