Le sumo est un sport qui fascine autant qu’il intrigue et qui ne laisse personne indifférent. Qu’il soit objet de curiosité ou de moqueries, il a su gagner au fil du temps un public international. Chaque année, le sumo attire de nombreux visiteurs venus de l’étranger.
Aux origines du sumo
Un art militaire
Au Moyen-âge, le Japon traverse une période de guerres civiles qui ravage le pays. Les samouraïs s’entraînaient en pratiquant le sumo pour se muscler et ainsi être plus fort au combat. Très vite, cette discipline a été intégrée à leur formation militaire.
Un divertissement sacré
Le retour de la paix au début du XVIIè siècle a contraint les samouraïs au chômage. Pour gagner quelques sous, certains n’hésitaient pas à combattre lors de festivités tenues dans les sanctuaires. Le sumo s’est ainsi transformé en spectacle populaire proche de sa forme actuelle.
La domination étrangère
Ces dernières années, des sports comme le baseball ou le football ont très nettement gagné en popularité, surtout auprès des jeunes. Le sumo a perdu en notoriété suite aux différents scandales qui ont ébranlé son image, mais le désamour est venu aussi du manque de champions japonais.
De plus en plus dominé par les étrangers, notamment venus de Mongolie, le public ne se reconnait plus dans ces nouveaux visages. Les trois grands champions actuels, les yokozuna*, sont exclusivement Mongols et l’un d’entre eux, Hakuho, est même le détenteur du nombre record de titres. Il aura fallu attendre janvier 2016 pour qu’un lutteur japonais remporte un tournoi, le premier en dix ans ! Depuis peu, le sumo retrouve une certaine popularité et les tournois se disputent de nouveau à guichets fermés !
Les sumotoris, ces demi-dieux vivants
Plus qu’une simple discipline, le sumo véhicule de nombreuses valeurs traditionnelles dont les lutteurs sont les gardiens. Les samouraïs, qui ont fait la fierté d’autrefois, voient leur code d’honneur, leur coiffure et même leur sabre perpétués aujourd’hui par les sumotoris. Une part du public recherche le côté divin qu’ils représentent. Le simple contact avec l’un de ces mastodontes devient une bénédiction.
Les plus représentatifs sont les yokozuna*, ces grands champions considérés comme des demi-dieux vivants. Reconnaissables à l’épaisse corde nouée autour de leur taille, ils endossent un rôle divin lorsqu’ils purifient, lors de rituels, le sol en écrasant de leurs pieds les mauvais esprits.
*Le yokozuna est reconnaissable lors des cérémonies à l’énorme ceinture blanche tressée nouée autour de sa taille, la tsuna. Grand champion ayant *Le yokozuna est reconnaissable lors des cérémonies à l’énorme ceinture blanche tressée nouée autour de sa taille, la tsuna. Grand champion ayant atteint le rang le plus élevé du sumo, il représente les divinités par son statut de demi-dieu. Dans l’histoire du sumo, il n’y a eu que 71 yokozuna dont 3 sont actuellement en activité.
*Le sel est jeté avant un combat pour purifier le sol. Lors des tournois, c’est 60 kilos de sel qui sont répandus chaque jour sur le dohyô !
Devenir le plus fort
Les entraînements se déroule dans les heya, écuries où vivent et s’entraînent les lutteurs. En suivant un ordre hiérarchique strict, les lutteurs travaillent l’endurance, la souplesse et la force. L’objectif est de parvenir au centre de gravité le plus bas possible, l’une des clés primordiales pour devenir champion. La séance débute par de longs échauffements et des étirements avant de s’exercer à pousser son adversaire. L’essentiel du travail est focalisé sur celui des jambes. En face, il faut résister à la charge et garder ses appuis.
Enfin, sachez que certaines écuries acceptent les visiteurs qui souhaitent assister à un entraînement, une expérience inoubliable !
Devenir toujours plus gros
Comment font-ils pour êtres si gros ?
La question se pose en voyant ces corps difformes. La réponse ne se trouve pas dans les chips, sodas et autres hamburgers mais dans le chanko !
Le chanko est un ragoût très nutritif constitué d’un bouillon auquel sont ajoutés des légumes variés ainsi que de la viande (principalement du poulet). Mangé quotidiennement et en grande quantité, il favorise la prise de graisse surtout quand il est suivi d’une bonne sieste. Le chanko n’est pas réservé qu’aux heya et de nombreux restaurants se sont spécialisés dans ce plat original, souvent tenus par d’anciens lutteurs à la retraite.
*Le chanko est la base de l’alimentation des lutteurs. La viande de poulet est utilisée symboliquement, car comme eux, les lutteurs doivent toujours rester en équilibre sur leurs deux jambes.
Un lutteur doit consommer entre 8 000 et 10 000 calories par jour.
Que le tournoi commence
La vie des lutteurs est rythmée par les honbasho, les tournois officiels organisés six fois par an.
Leur carrière dépend des résultats obtenus à la fin de ces honbasho qui durent 15 jours.
Les tournois attirent de nombreux Japonais, mais aussi des étrangers de passage curieux de découvrir ces traditions. Les matchs sont retransmis à la télévision pour le plus grand plaisir des amateurs qui aiment retrouver cette tension d’avant match qui contraste tant avec le côté mystique des rituels. Les combats se déroulent dans une aire circulaire appelée dohyô. La règle est simple : il faut pousser l’adversaire en dehors du dohyô ou lui faire toucher le sol avec une autre partie de son corps que la plante de ses pieds.
Le déroulement d’un combat
Les combats sont toujours fugaces mais les nombreux rituels qui les précèdent sont longs et élaborés. A bien regarder, chaque geste de préparation à un sens précis qu’il est intéressant d’observer.
Sur le dohyô se tiennent les deux lutteurs, l’arbitre appelé gyôji et le yobidashi. Ce dernier, appelle les lutteurs à monter sur le dohyô pour combattre.
Respectivement situés à l’est et à l’ouest, les adversaires effectuent un premier levé de jambes pour s’étirer mais aussi pour écraser les mauvais esprits. Puis, en position accroupie se rincent la bouche avant de saisir une poignée de sel et de la jeter sur le dohyô pour le purifier. Face à face, les deux hommes présentent leurs mains ouvertes pour prouver à son adversaire que le combat sera loyal et sans arme. Ces rituels vont se répéter à plusieurs reprises.
Pendant ce temps, les yobidashi balaient soigneusement la surface et paradent sur le dohyô en brandissant des drapeaux, ce sont en fait des publicités. Une fois que les deux lutteurs sont prêts, l’arbitre donne le départ, le combat peut commencer.
La charge frontale est violente et l’affrontement ne dure que quelques instants. Une fois le match achevé, l’arbitre annonce le vainqueur de la rencontre. Si le combat a été préalablement sponsorisé, il remet au gagnant les enveloppes qui contiennent les gains. Le clou de la journée se termine toujours par le combat des yokozuna. La journée s’achève par le son des tambours invitant les spectateurs à revenir le lendemain.
Pour de nombreux Japonais, le sumo est bien plus qu’un simple sport. Regarder les tournois c’est replonger dans l’âme du Japon éternel, renouer avec ses traditions et quelque part retrouver une certaine spiritualité en contemplant ces demi-dieux.
gauche) Le gyôji arbitre les combats, encourage les lutteurs et remet les (gauche) Le gyôji arbitre les combats, encourage les lutteurs et remet les primes. C’est aussi lui qui est chargé de calligraphier le classement des lutteurs. Il doit toujours désigner un vainqueur même en cas d’ex æquo.
(droite) Le yobidashi appelle les lutteurs à monter sur le dohyô avant le combat, parade avec des banderoles publicitaires et balaie la surface de sable. Son éventail de papier lui sert à éviter qu’il ne postillonne sur l’aire sacrée qui ne doit jamais être souillée.
Kimarite
Les kimarite sont les techniques utilisées pour remporter un combat. Il y en a au total 82 répertoriées dont voici les trois plus couramment utilisées :
(gauche) Yorikiri
L’attaquant conduit son opposant en arrière hors du cercle en le tenant par une prise sur le mawashi en permanence.
(milieu) Oshidashi
L’attaquant pousse son opposant en dehors du dohyô sans attraper son mawashi.
(droite) Uwatenage
L’attaquant, depuis une prise extérieure, balance son opposant sur le sol en le tirant vers le bas.
Texte : Yohann Valdenaire
Illustrations : POSTICS