Pourtant, monter une entreprise comme PD Aerospace au Japon, même avec l’expérience et la détermination d’Ogawa Shûji n’allait pas de soi. A l’époque, le concept de start-up était à peine connu dans le pays, où l’écrasante majorité des jeunes de 22 ans étaient censés rester dans une même entreprise jusqu’à la retraite. “J’ai invité des collègues à me rejoindre, mais personne n’est venu. Ils ont préféré avoir une vie stable”, ironise-t-il. C’est comme ça qu’il est retourné dans l’ancien “labo” de son père, où il s’amusait à réparer des jouets 30 ans auparavant. Sans collègues, sans le soutien d’une grande entreprise et sans financement, Ogawa Shûji a dû compter sur sa seule passion. “Mais si on commence à se plaindre et à dire qu’il manque telle ou telle chose, ce sera impossible de créer une navette spatiale !” plaisante-t-il.
Pour régler la question du financement, il a sillonné l’archipel pour rendre visite à des investisseurs et essayé de les convaincre en leur parlant de l’immense potentiel de son projet. En 2009, il s’est présenté à un hackathon et a terminé deuxième. Dans la soirée après le concours, il s’est avancé vers Sawada Hideo, président de l’entreprise de tourisme HIS, qui a voté en faveur de son projet lors de la finale. Avec son franc-parler, il lui a demandé de l’aide financièrement. Sawada, qui rêvait aussi de devenir astronaute quand il était petit, a accepté. Son projet a fini par intéresser le président d’All Nippon Airways (ANA), Katanozaka Shinya, qui s’est même rendu dans son labo. “On ne peut pas dire que son labo était grand et bien équipé”, a plaisanté ce dernier lors de la conférence de presse tenue pour rendre public le partenariat entre les trois sociétés. “Mais j’ai été impressionné de voir la passion avec laquelle il travaillait.”
Ce partenariat, qui lui a permis de lever l’équivalent de 420 000 euros, est une grande avancée pour Ogawa Shûji qui devait jusqu’à présent retarder ses projets à cause du manque de financement. “Avec le soutien de ces deux grosses entreprises, enfin mon projet avance”, dit-il. “Mais ce n’est que le début. Pour la réalisation de mes projets, c’est loin d’être suffisant.” Dix ans après sa création, PD Aerospace dispose d’une équipe d’une quarantaine de personnes, composée à la fois de salariés et de bénévoles, alors qu’elle était “dans l’impossibilité de recruter” au début. Malgré cette avancée en termes de financement et de ressources humaines, force est de constater que son projet est très loin de sa phase finale. “S’il y avait cent étapes en tout, je n’en serais qu’à la troisième”, estime Ogawa Shûji en fronçant les sourcils.