La fabrique Morino-Yoshino Kuzu, qui confectionne de l’amidon de kuzu (fécule), est installée à Ôuda depuis 1616. La petite boutique qui donne sur la grande rue et sa vitrine désuète sont inchangées depuis quatre siècles; les méthodes de fabrication du kuzu n’ont pas évolué non plus au cours du temps. Un climat froid et une eau pure sont nécessaires pour confectionner la précieuse fécule blanche que l’on utilise dans la cuisine traditionnelle, la pâtisserie fine et la pharmacopée traditionnelle. La fabrique est de plus agrémentée de l’un des plus anciens jardins botaniques privés du Japon, créé en 1729 par Morino Tosuke, le 11e dans la lignée des propriétaires de la manufacture, où sont cultivées environ 250 plantes médicinales. Des hauteurs du jardin botanique le visiteur appréciera une vue d’ensemble du quartier de Matsuyama.
La ville d’Ôuda était en effet très réputée pour sa production de remèdes, médicaments et plantes médicinales utilisés par la cour impériale. Un petit musée de médecine traditionnelle, Kusuri-no-Yakata, retrace l’histoire de la prospère industrie pharmaceutique développée à Ôuda. L’élégant bâtiment du musée, construit en 1803 et orné d’une formidable enseigne d’angle, est l’ancienne maison de la famille Hosokawa, des marchands grossistes en médicaments qui fondèrent par la suite l’une des plus importantes entreprises pharmaceutique du Japon, Fujisawa qui, associée à la société Yamanouchi Pharma, forme aujourd’hui le groupe Astellas Pharma Inc.. Cette longue tradition explique que de nombreuses familles à l’origine de l’industrie pharmaceutique du Japon sont originaires de la préfecture de Nara.
En poursuivant sur la même ligne Kintetsu puis en changeant de compagnie pour prendre la ligne Wakayama, le voyageur peut se rendre jusqu’à la petite ville de Gojô située plus au Sud, à environ une heure de train local. Sur le trajet, un peu avant d’arriver à la gare d’Asuka, le mausolée de l’empereur Kinmei (509-571), premier souverain du Japon dont l’historiographie moderne peut certifier l’existence de façon précise, apparaît à la gauche du train. Gojô est une étape bien attrayante : petite ville peu connue et jusqu’à présent épargnée par l’afflux de touristes qui envahissent Kyôto, elle a pourtant un riche passé et est agréable à visiter. On peut y trouver des auberges confortables, de très bonnes tables. Elle est par ailleurs un bon point de départ pour des excursions vers les sentiers de montagnes du sud du département.
Le quartier historique de Shinmachi longe la rivière Yoshino, il était autrefois animé par les marchands qui venaient d’Isé, de Yamato ou de Kii par les anciennes routes de commerce. Dans ce quartier subsistent encore de nombreuses bâtisses de l’époque d’Edo : de vastes boutiques de wagashi (pâtisserie japonaise traditionnelle), Hitotsu-Bashi, un authentique fabricant de mochi (gâteau de riz glutineux), la fabrique de shoyu (sauce de soja) Nakako, mais également le Kuriyama-tei une demeure construite en 1607 que l’on considère être la maison d’habitation la plus ancienne du Japon.
La rivière Yoshino, à laquelle est adossée la ville, apparaît dans le Man’yôshû, la plus ancienne anthologie de la poésie japonaise, et est mentionnée à travers l’histoire depuis le VIIIe siècle. Gojô est également un point de départ idéal pour aller visiter le mont Kôya qui se trouve légèrement plus à l’est. À Gojô, se trouvent d’ailleurs plusieurs lieux liés à la légende du moine Kûkai, plus connu sous le nom de Kôbô-Daishi, le fondateur de l’école bouddhiste Shingon. Un pèlerinage jusqu’au Kongôbu-ji, temple principal du bouddhisme Shingon, fait partie des visites incontournables dans la région. Au cœur du quartier historique se trouve l’auberge Yanaseya (http://yanaseya.info), à l’origine une maison de médecin de l’époque Taishô (1912-1926), entièrement rénovée et transformée en pension luxueuse en 2011. C’est l’Américain Alex Karr, spécialiste de l’aménagement et de la modernisation des maisons traditionnelles japonaises, qui en a supervisé la rénovation. Des plafonds avec poutres apparentes et du mobilier ancien sont aujourd’hui associés à du verre et des meubles modernes et donnent une impression de grand confort.