Le mouvement japonisant commença à s’essouffler au tournant du siècle suivant. Les estampes avaient atteint des prix très élevés, la joie de la découverte suivie de l’emprunt que firent les artistes à l’art japonais fut assimilée. Hayashi, Goncourt, Burty et de nombreux collectionneurs quittèrent ce monde à ce moment-là.
Il fallut alors attendre près d’un siècle pour voir surgir les expressions, néo-japonisme ou nouveau japonisme, dont le sens est très différent de celui du siècle précédent. L’engouement pour la culture manga et l’animation japonaise de la jeune génération des années 1980 entraîna une nouvelle fascination pour la culture japonaise. L’étonnement et l’enchantement provoqués par la culture japonaise du “kawaii” (mignon) ou par des artistes contemporains comme Murakami Takashi qui puisent à la racine de l’art traditionnel pour concevoir des œuvres originales et ludiques, ont donné naissance à ces multiples “Japonismes” célébrés en France au cours de cette année.
Des artistes sous influence
Claude Monet n’hésitait pas à affirmer : “S’il vous faut de vive force, et pour les besoins de la cause, trouver à m’affilier, rapprochez-moi des vieux Japonais : la rareté de leur goût m’a de tout temps diverti et j’approuve les suggestions de leur esthétique qui évoque la présence par l’ombre, l’ensemble par le fragment.” Dans son tableau La Japonaise, le Japon et ses japonaiseries semblent n’être qu’un prétexte décoratif. Plus tard, dans son jardin aux accents japonais et ses grandes décorations de nymphéas qui semblent inspirées des fusuma (cloisons de papier de la maison traditionnelle japonaise) et des paravents, il ne cessa de rendre hommage à ce lointain pays qu’il aurait aimé visiter.
Vincent Van Gogh évoqua les estampes à de nombreuses reprises dans sa Correspondance. Il alla jusqu’à en copier certaines et en représenta dans son tableau du Père Tanguy. Elles sont restées pour lui une source d’inspiration.
Le graveur Henry Rivière rendit un hommage à Hokusai par sa série des Trente-six vues de la Tour Eiffel.
Edouard Manet s’inspira largement des aplats, des cadrages et gros plans des estampes.
Edgar Degas se serait inspiré de la Manga de Hokusai pour certaines poses de ses danseuses.
Les peintres nabis dont Pierre Bonnard, surnommé le “japonard”, les collectionnèrent et s’en inspirèrent aussi.
Brigitte Koyama-Richard*
*Professeur à l’université Musashi de Tôkyô, elle est l’auteur de nombreux ouvrages dont Beautés japonaises (2016) et Yôkai (2017) aux éditions Scala.