Francis Karl Gurtlinger note que certains clients japonais sont heureux de voir un chauffeur de taxi étranger. “Ils nous considèrent comme une sorte de porte-bonheur. Ils semblent tout à fait nous pardonner même lorsque nous commettons une erreur, peut-être parce que nous sommes des étrangers. De temps en temps, nous pouvons rencontrer un problème – ce qui fait partie de ce travail – mais je considère ce genre d’expériences comme une bonne façon d’apprendre.” Les clients ivres sont le seul véritable problème. Par exemple, si une personne qui boit s’endort, vous ne pouvez pas la toucher. Vous devez plutôt vous rendre au poste de police le plus proche et demander de l’aide.
Le seul point à propos duquel les chauffeurs expriment des sentiments mitigés concerne l’aspect économique de leur travail. Une fois la période de formation terminée et le moment où ils commencent à travailler, les chauffeurs se voient garantir un salaire mensuel de 300 000 yens [environ 2 400 euros] pour les six premiers mois ou de 250 000 yens pour la première année, mais uniquement s’ils remplissent certaines conditions, notamment celle de fournir un garant. Quoi qu’il en soit, une fois la période salariée terminée, ils sont rémunérés à la commission et perçoivent entre 52 % et 62 % de ce qu’ils perçoivent.
“Je n’avais pas de garant”, raconte Francis Karl Gurtlinger. “J’ai donc été payé à la commission dès le début. Les débutants gagnent environ 180 000 à 190 000 yens [environ 1 500 euros] par mois. Pour les conducteurs plus expérimentés, la recette moyenne est d’environ 50 000 yens par jour, ce qui signifie qu’ils rapportent environ 230 000 yens par mois. Pour être honnête, cela ne vaut pas la peine. Je pense qu’ils devraient nous payer plus – environ 350 000 yens – compte tenu du nombre d’heures que nous effectuons. Pour être franc, je suis venu ici en pensant que je gagnerais plus. J’ai été très contrarié car, lors du premier entretien, on m’avait laissé entendre que je gagnerais au moins entre 250 000 à 300 000 yens. Alors, j’ai l’impression de m’être fait avoir en venant ici”, explique-t-il.
Otsu Kazumi, le responsable des ressources humaines chez Hinomaru, se dit très impressionné par les résultats des chauffeurs étrangers. Son entreprise espère en engager 100 d’ici l’ouverture des Jeux Olympiques. “Le fait même qu’ils vivent au Japon signifie qu’ils aiment le pays”, dit-il. “Cela en fait des personnes idéales pour présenter les avantages de la culture japonaise.”
Reste à savoir combien de temps l’entreprise pourra les garder. Certains d’entre eux, par exemple, voient leur travail chez Hinomaru comme une étape formatrice avant de se lancer dans ce qu’ils veulent vraiment faire. “J’aime Ishikawa et je veux y retourner un jour”, martèle Francis Karl Gurtlinger. “Ce n’est pas facile de voyager dans la péninsule de Noto où je résidais auparavant. C’est une région très rurale et le service de bus se termine à 20h30 ou à 21h00. Je compte donc y retourner, ouvrir un minshuku (un gîte) et lancer une entreprise de taxis de tourisme.”
J. D.