Bien évidemment, ce délice est en bonne partie dû au talent du chef Kaibara. Formé en cuisine italienne, il s’est pris de passion pour la cuisine historique, et a décidé de reprendre une formation en cuisine japonaise. Il a mené dix ans de recherches sur l’époque d’Edo avant d’ouvrir son restaurant dans le quartier de Shiba, berceau du style culinaire d’Edo, et dont les crevettes shibaebi (crevettes de Shiba) portent encore le nom. Ce quartier situé à côté de Ginza ou de la gare de Tôkyô d’aujourd’hui était naguère une plage où abondaient crevettes, coquillages et petits poissons que l’on pouvait pêcher à pied.
Si le chef, ainsi que quelques autres institutions spécialisées dans la cuisine de l’époque d’Edo comme le restaurant Nabeya, désormais fermé, ou le Yaozen fondé il y a 300 ans, peuvent réaliser leurs menus, c’est aussi parce que les documents de l’époque ne manquent pas. Bien évidemment, la description des recettes est pour ainsi dire plus “sommaire” (ce qui ne veut pas dire que la cuisson était approximative : à l’époque, on ne notait pas les éléments qui étaient évidents), mais ces écrits sont suffisants pour aider à comprendre les techniques de préparation.
Le chef nous explique également que la mise en plat du restaurant est fidèle au visuel de l’époque, et ce, grâce aux estampes. On y apprend également des coutumes de l’époque : qu’il y avait des échoppes, ancêtres des izakaya (bistrot japonais), qui ne servaient que des plats pour accompagner le saké, tels que les patates cuites, la viande de sanglier ou les tofu grillés, ou encore que les œufs de poules étaient plus onéreux que leur chair… Chaque plat a une histoire, un sens, et, comme on dit, on en sort moins bête. Vous pouvez déguster le tout accompagné de l’Edo Kaijô, un saké brassé dans le quartier de Shiba, si le cœur vous en dit.
Si vous comprenez le japonais, vous pourrez avoir une véritable leçon de cuisine historique, car le chef peut vous expliquer en détail l’origine de chaque plat. Un voyageur étranger pourra tout de même se sentir à l’aise dans ce restaurant à l’atmosphère chaleureuse, mais calme (le chef souhaite créer un lieu où l’on peut venir se délecter d’un moment en solitaire), et faire un voyage dans le temps, dans une époque lointaine concrétisée par les goûts. C’est ça, la magie de la cuisine.
Sekiguchi Ryôko
informations pratiques
TAIKA, 2-9-31, Shiba, Minato-ku, Tôkyô
Tél. 03-3453-6888. Ouvert de 18h à 24h.
Fermé le samedi.