J’ai vu beaucoup de sanctuaires et de temples lors de mon passage sur l’île de Sado, mais peu étaient aussi beaux que le Seisui-ji, un temple vieux de 1200 ans qui ne manquera pas de susciter la curiosité de ceux qui connaissent Kyôto. En effet, le Seisui-ji est une réplique plus petite mais fidèle du Kiyomizu-dera, construite par un moine qui, lors de sa visite sur l’île de Sado en 808, a réalisé qu’il devait être très difficile pour les insulaires de se rendre dans la capitale impériale et d’y découvrir ses trésors. Bien que dépourvu de la splendeur majestueuse du bâtiment dont il est inspiré, le Suisei-ji est beaucoup plus reposant car les hordes de touristes armés de leurs appareils photos ne sont nulle part en vue. Il est également assez délabré, ce qui paradoxalement, ajoute à son charme.
L’autre caractéristique historique importante de l’île est beaucoup plus récente. Il s’agit de la mine d’or et d’argent d’Aikawa. Bien que déjà mentionnée dans Histoires qui sont maintenant du passé (Konjaku monogatari shû, éd. Gallimard, 1968), une anthologie de récits de la fin du XIIe siècle), la mine a été systématiquement exploitée à partir du début du XVIIe siècle par le nouveau shogunat des Tokugawa. A son apogée, elle fournissait 400 kilogrammes d’or par an.
La nouvelle prospérité a attiré des ingénieurs, des mineurs, des techniciens et des charpentiers. Cependant, l’augmentation de la population n’a pas été suffisante pour assurer le fonctionnement rapide de la mine, ce qui a conduit le gouvernement à envoyer des dizaines de sans-abri de tout le pays à Sado et à les forcer à travailler comme esclaves. Ces personnes étaient connues sous le nom de hoito et, comme les burakumin, elles étaient victimes de discriminations et connaissaient des conditions de vie très difficiles.
Huit grosses veines d’or s’étendaient sur 3 kilomètres d’est en ouest, 600 m du nord au sud et à 800 mètres de profondeur. Au total, 78 tonnes d’or et 2 300 tonnes d’argent sont venues remplir les coffres du gouvernement pendant les 373 années de son exploitation entre 1601 et 1974. Après avoir été définitivement fermée en 1989, la mine a été préservée comme un bel exemple de patrimoine industriel et est devenue une attraction touristique. De nos jours, elle abrite des dizaines d’automates effrayants qui martèlent. Il y a deux mines principales – une de la période Edo (1603-1868) et une autre de la période Meiji (1868-1912) – pour un total de 400 kilomètres de tunnels (la même distance entre Sado et Tôkyô). De l’extérieur, on peut même se rendre sur l’un des sites les plus emblématiques de Sado : la montagne qui se trouve au-dessus de la mine a perdu sa partie centrale comme si un géant avait abattu sa hache de guerre en plein milieu.
Mis à part la mine d’or, la situation géographique de Sado, à la jonction des courants chauds du sud et du froid du nord, en a fait une escale vitale pour les kitamaebune, ces navires marchands qui naviguaient sur la mer du Japon et assuraient les échanges entre Osaka et Hokkaidô. Ces navires achetaient des produits locaux à des prix inférieurs avant de les vendre à des prix plus élevés dans des endroits éloignés. Les produits populaires de Sado étaient les produits en bambou et en paille, les kakis séchés, les filets de pêche, la pâte de miso, la sauce de soja et la boisson des dieux, le saké.
La ville d’Ogi est devenue à la fois un port important pour expédier l’or et l’argent, et l’endroit par lequel les produits culturels en provenance de tout le Japon faisaient leur entrée sur l’île. Par exemple, Sado Okesa, l’une des chansons populaires japonaises, trouve son inspiration dans une autre chanson qui a pour origine Kyûshû. Par ailleurs, le Kojishimai est un spectacle de musique et de danse shintoïste apparu initialement dans le Tôhoku, au nord-est de l’île de Honshû.