Sanjô serait-elle une ville sans charme ? Ne tournons pas autour du pot : ouvrez tous vos guides touristiques sur le Japon, qu’ils soient en français, en anglais ou dans n’importe quelle langue, vous ne trouverez rien concernant les deux villes mitoyennes de Tsubame-Sanjô. Lorsque les guides mentionnent la région, c’est évidemment pour évoquer Niigata (son riz et son saké), Nagaoka (voir pp. 18-21) ou encore la magnifique île de Sado (voir pp. 22-24). Mais concernant Tsubame-Sanjô, qui possède pourtant sa gare de train à grande vitesse, pas un mot ! Et pour cause, touristiquement parlant, ces deux cités n’ont clairement rien de spectaculaire à proposer. Ici, la plaine est monotone, pas de sources chaudes naturelles, pas de temple ou de sanctuaire qui mobilisent les pèlerins et encore moins de grandes fêtes d’été motivant les foules à se rassembler depuis les provinces avoisinantes. De tout temps, Tsubame-Sanjô a été une cité industrielle et une ville dortoir pour les milliers d’ouvriers qui travaillaient dans les usines de métallurgie. Malgré ce triste constat, Tsubame-Sanjô peut s’enorgueillir de quelque chose, son savoir-faire dans le domaine métallurgique. Et ce, depuis les débuts de l’ère d’Edo (1603-1868) ! Déjà à l’époque, les techniques inégalées des artisans de la région attiraient les amateurs de beaux objets en métal. Les voyageurs rapportaient volontiers de leur séjour de splendides kiseru (longues pipes métalliques), rasoirs ou encore des tampons-encreurs, en guise de souvenirs. Sur une toute autre échelle, les premières usines réalisaient les clous, les tenailles, les couteaux, les scies, les marteaux et autres rabots les plus fiables du pays. Dès le XVIIIe siècle, la réputation de Tsubame-Sanjô est faite et c’est d’ailleurs à cette époque que naissent certains ateliers encore en activité de nos jours. Quelques siècles plus tard, lorsque les besoins nationaux en fer et en acier sont devenus exponentiels, l’artisanat s’est progressivement transformé en une industrie florissante. Le Japon avait besoin de matrices et de moules fiables pour fabriquer les pièces nécessaires à la production de chars, d’avions, d’armes et de millions d’autres objets heureusement bien plus inoffensifs. C’est bien souvent aux usines de Tsubame-Sanjô que l’on faisait appel. Elle a ainsi prospéré et contribué à l’essor d’un pays, avant mais aussi après sa défaite de la Seconde Guerre mondiale.