Grâce à lui, la préfecture occupe la plus haute marche sur le podium des producteurs de riz devant Hokkaidô et Akita. Une place que ces poursuivants auront du mal à lui contester dans la mesure où elle les domine de la tête et des épaules dans ce secteur. Les agriculteurs locaux ont réussi à en maîtriser la production alors qu’il est réputé difficile à cultiver. Dès lors, on peut comprendre pourquoi il se dégage une telle fierté chez les producteurs locaux, conscients de posséder un “or blanc”. C’est notamment le cas du côté d’Uonuma et Minami-Uonuma, au sud-est de la préfecture, où l’on estime fournir le meilleur riz en raison de conditions microclimatiques favorisant la chaleur le jour et une belle fraîcheur la nuit. La combinaison donne à la production locale une saveur unique, très recherchée.
L’abondance de la production rizicole dans cette région entourée de montagnes qui fournissent une eau de grande qualité s’est aussi traduite par l’essor du nombre de brasseries de saké. Avec 89 entreprises spécialisées dans la réalisation de ce breuvage fermenté, la préfecture se classe encore en tête au niveau national. Elle a bénéficié de l’évolution des goûts en matière de saké puisque, au tournant des années 1980, les Japonais ont commencé à considérer le saké de terroir (jizake) avec bienveillance alors que, par le passé, ils préféraient les productions industrielles. Les brasseurs de Niigata profitent de ce changement d’attitude et voient la demande s’envoler alors que, dans le même temps, elle a tendance à baisser dans les autres régions, en particulier dans les zones traditionnelles de production comme Kyôto. La réputation de la pureté de l’eau et des variétés de riz utilisées pour le brassage de “la boisson des dieux” dans la région contribue à transformer la préfecture en une zone de référence. D’ailleurs, elle se positionne largement en tête pour ce qui est de la production de ginjô (saké de qualité supérieure).
Autrement dit, en matière de riz, tout sourit à Niigata et elle pourrait se reposer sur ses lauriers. Mais c’est loin d’être le cas. La préfecture est leader pour d’autres produits agricoles, mais cela reste peu connu au grand dam des agriculteurs pour qui il n’y a pas que le riz dans la vie. L’aubergine est une autre spécialité de la préfecture. C’est ici qu’elle est la plus cultivée dans l’Archipel. Les spécialistes estiment que le manque de notoriété de l’aubergine de Niigata s’explique par le fait que l’essentiel de sa consommation se fait à l’intérieur de la préfecture. Seuls 34 % de la production sont “exportés” au-delà des limites préfectorales. Profitant du climat chaud et humide de la région, l’aubergine a trouvé le bon endroit pour être produite. Sa culture s’intercale parfaitement entre la saison du repiquage du riz et sa moisson. Une vingtaine de variétés sont proposées aux consommateurs qui s’en régalent. C’est dans la région de Nagaoka que l’on trouve, dit-on, les meilleurs producteurs d’aubergines et plusieurs restaurants s’en sont fait une spécialité en préparant des plats adaptés aux différentes sortes à disposition de la yakinasu recommandée pour être grillée à la kinchaku dont la douceur se marie bien avec du gingembre.
En dehors des aubergines, un autre produit fait la fierté de la préfecture : les fèves de soja ou edamame. Dans ce domaine, bon nombre de consommateurs savent que Niigata est leader car plus de la moitié de sa production est vendue en dehors de la préfecture. Là encore, les cultivateurs de Niigata font preuve de leur savoir-faire puisqu’ils en proposent pas moins de 40 variétés. La Kurosaki Chamame est de loin la plus célèbre et la plus réputée, notamment pour son croquant et son parfum unique, auprès des amateurs. Produite à Kurosaki, dans l’arrondissement de Nishi à Niigata, elle est la “reine des edamame”, un titre que personne semble vouloir contester aujourd’hui.
Bien d’autres produits, notamment issus de la pêche, ont permis à la préfecture de développer une gastronomie de qualité. A l’époque où le port de Niigata, c’est-à-dire aux XVIIe et XVIIIe siècles, était une étape importante pour les kitamaebune, ces navires assurant le commerce entre le nord et le sud de l’Archipel, elle a développé une solide culture gastronomique qu’il convient de ne pas oublier.
Gabriel Bernard
Terroir : Il n’y a pas que le riz dans la vie
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