Pour Noël, les boulangeries spécialisées offriront à leur clientèle cette spécialité italienne qui a le vent en poupe.
Les Japonais, pour qui Noël n’est pas une tradition, ont toujours pris la liberté de l’interpréter comme bon leur semble. Le jour de la nativité est passé d’un moment de beuverie à une soirée entre amoureux, avant de regagner sa place de fête familiale. Le même sort a été réservé aux gâteaux consommés à Noël. Il y a eu le fraisier, puis les crèmes glacées et les bûches… la mode étant au stollen ces derniers temps, on le retrouvait dans les vitrines de quasiment toutes les pâtisseries, et ce dès le mois de novembre. Mais il risque fort d’être détrôné par un nouveau concurrent, cette fois-ci venu d’Italie : le panettone.
Il faut certes nuancer. Les Japonais ne sont pas les premiers à se ruer sur ce délice, le panettone étant en train de gagner du terrain dans de nombreux pays. Même en France, on commence à le trouver préparé de façon authentique, avec du levain panaire. Mais il est bien connu que lorsque les Japonais s’y mettent, ils ne rigolent pas. Une association, la Panettone Society a même été créée par des chefs et des journalistes il y a deux ans de cela, pour la promotion de ce gâteau traditionnel au Japon. Ils organisent des dégustations de panettone italien et japonais, des séminaires pour mieux connaître son histoire, et même des master class dirigées par Suzuki Yahei. Ce dernier, chef du restaurant une étoile le Piatto Suzuki, a participé aux cinq concours de panettone à Milan, où il a raflé des récompenses. On lui a même décerné le titre de “maestro”…
Il y a deux ans également, Less, une boutique spécialisée dans les panettones, a ouvert ses portes à Tôkyô. Ici, les authentiques gâteaux sont confectionnés par un tandem italo-japonais, Gabriele Riva et Sakakura Kanako, avec du levain spécialement apporté de Milan. Quant à Pane & Olio, une boulangerie spécialisée dans les pains italiens, elle propose également un panettone qui a remporté deux prix au concours de Milan.
Et parmi la variété de propositions en constante augmentation dans l’archipel, on retrouve bien évidemment des versions japonisantes : aux agrumes (sudachi, kabosu, yuzu…), à la pomme, à la mûre, à la myrtille, aux produits de saison (châtaignes, sakura…).
L’année dernière, à Ginza, la marque de luxe Bulgari a vendu un panettone salé au prix de 10 000 yens (80 euros). La chaîne de boulangerie Donq, fondée il y a 116 ans au Japon, confectionnait déjà des panettones dans les années 1970 et en propose une version plus abordable. Les boulangeries continuent d’envoyer leurs artisans en formation en Italie, pour faire perdurer la méthode authentique à l’italienne.
Comme son nom l’indique, le mot “panettone” étant probablement dérivé de “panetto”, ou “petit pain”, il est plus proche du pain que du gâteau et les Japonais auraient pu tout à fait le trouver moins glamour pour fêter Noël. Mais la tendance du “pain de mie de luxe” est arrivée entre-temps et il n’est plus étrange d’offrir un pain en cadeau, tel un gâteau. La frontière pain-pâtisserie est bien plus floue qu’autrefois, et c’est probablement ce qui a permis cette mode du panettone.
Sekiguchi Ryôko