Spécialité estivale, ce bol de glace pilée recouvert de divers ingrédients s’impose désormais n’importe quand.
Le kakigôri (glace pilée), incontournable de l’été japonais connaît un succès en dehors de ses frontières depuis quelques années (voir Zoom Japon n°102, juillet 2020). Cette mode a fait naître des variantes dans chaque pays où il s’est importé, comme à Taïwan ou en Corée. Aujourd’hui, on le retrouve même à Paris, dans des lieux tels que chez Tomo, Toraya, Ogata, ou encore à Hexagone Café.
Pendant ce temps au Japon, il continue à connaître sa propre évolution. Selon les statistiques réalisées par l’entreprise Line research, ce sont les adolescents les plus fervents amateurs de ce dessert pourtant millénaire (Sei Shônagon en parlait déjà dans ses Notes de chevet). Mais, tandis que les adultes apprécient les goûts traditionnels comme ujikintoki (saveur matcha et haricots rouges) ou azuki rennyû (haricots rouges et lait condensé), les jeunes n’hésitent pas à se laisser tenter par des goûts nouveaux comme la mangue, la pomme verte ou encore l’ananas, des saveurs apparues tout récemment.
Alors, quelles sont les dernières tendances au Japon ? Une chose est sûre, c’est que cette spécialité à l’origine estivale fait aujourd’hui partie des desserts servis toute l’année. Et si c’était jadis une douceur préparée à la maison ou achetée à la plage à un prix dérisoire, aujourd’hui il est des lieux qui proposent des versions plus raffinées. Non seulement il n’est plus rare de voir des kakigôri bio, avec des sirops faits maison à partir de vrais fruits, mais on voit également apparaître les kakigôri nature (tennen), dont les glaces se sont formées dans des citernes ou dans des lacs naturels pendant l’hiver, puis conservées dans des himuro (chambre à glace), caractérisées par la pureté de leur goût et leur transparence. Au début du XXe siècle, une centaine de chambres à glace existaient au Japon, mais seulement trois subsistent encore aujourd’hui.
Dans les palaces, les kakigôri “de luxe” pullulent. La star de cette année est celui monté sur un melon coupé en deux. Ceux qui connaissent les prix des fruits au Japon peuvent aisément supposer que la facture est salée pour cette douceur composée principalement d’eau… de 27 euros jusqu’à 55 euros !
Mais cela ne veut pas dire pour autant que les Japonais ont abandonné la confection du kakigôri chez eux. Les machines à piler la glace sont toujours en vente, on peut se les procurer très facilement, il y a l’embarras du choix : manuelle et électrique, pour une variété de textures, facile à manipuler pour les enfants ou pour les professionnels…) à tous les prix (de 25 à 300 euros).
Parmi les kakigôri les plus originaux, on peut voir le kakigôri à la “Mont Blanc” avec de la crème de marrons, celui au sirop de thé noir japonais, ou à la panna cotta au lait du coco, au lait aux amandes et à la liqueur amaretto… Pierre Hermé avait déjà réalisé en 2018 un “kakigôri Isphahan”, à la saveur rose et litchi. Tout est possible avec le kakigôri. La simplicité et les possibilités infinies de ses déclinaisons avec ce côté ludique seraient le secret de son succès. À l’heure où la canicule frappe de plus en plus dans tout l’Hexagone, le kakigôri a toutes les chances de s’installer durablement dans nos habitudes estivales.
Sekiguchi Ryôko