Amateurs de cuisine, les Taïwanais ont su adapter et mettre à leur goût bon nombre de plats venus du Japon.
Sous domination japonaise durant cinquante ans, entre 1895 et 1945, Taïwan a par conséquent découvert assez tôt la cuisine japonaise. A l’époque, les restaurants japonais qui s’installaient à Taïwan étaient destinés principalement aux clients japonais et les locaux fortunés. Et c’est au milieu du XXe siècle que cette cuisine a véritablement gagné en popularité. Les sushi, tonkatsu (voir Zoom Japon n°62, juillet 2016), oden (une sorte de pot-au-feu mélangeant divers légumes et pâtes de poissons cuits dans du dashi), râmen (voir Zoom Japon n°26, décembre 2012), tempura, satsuma-age (pâte de poisson frite), yakiniku (viande grillée au barbecue) sont devenus des mets familiers pour une grande partie des Taïwanais.
Ces plats, ils les déclinent cependant à leur manière. Il existe en effet des restaurants dits nisshiki (qui veut dire “à la manière de” ) que l’on retrouve également en Chine, en Corée, à Hong Kong ou à Singapour. Cette expression, lorsqu’elle est utilisée pour la cuisine, désigne souvent des plats ou des restaurants qui correspondent à l’image du Japon parfois adaptés localement. On peut ainsi y trouver des sushi qui sont très peu ou pas du tout assaisonnés au vinaigre, de la soupe miso et des râmen moins salés, de la mayonnaise plus sucrée, des maki sans riz (à la place, ils utilisent des choux crus finement coupés) fourrés aux asperges, au surimi…
Mais après le boom de la culture japonaise dans les années 1980, la cuisine nippone ne cesse d’évoluer et les restaurants japonais se multiplient. Au même moment, les touristes taïwanais, de retour du Japon où ils ont pu goûter à la vraie cuisine locale du quotidien, manifestent l’envie d’un répertoire de plats plus variés que ceux qui étaient traditionnellement au menu auparavant.
Les Taïwanais partagent avec les Japonais un goût prononcé pour la street food, et les plats populaires tels que les brochettes, les okonomi-
yaki (galettes de farine avec des choux et autres ingrédients au choix : viande, calamar, œuf, parfois même des nouilles…) et les takoyaki (boulettes de farine fourrée au poulpe) font partie des plats préférés des Taïwanais. Autre particularité de Taïwan : les chaînes de restaurants japonais y sont souvent implantées, notamment celles qui proposent râmen, udon, sushi, tonkatsu ou encore teishoku (plateau composé d’un plat principal, de riz, d’une soupe et de tsukemono), ce qui permet aux Taïwanais de goûter des plats comme au Japon. De plus, les restaurants gastronomiques de sushi ou de kappô proposent des cuisines de grande qualité – Taipei étant d’ailleurs devenue l’une des métropoles où il y a le plus de restaurants japonais dans le monde.
La proximité géographique et culturelle entre ces deux pays fait que les échanges culinaires nippo-taïwanais, ainsi que les mets qui en sont issus comme par exemple le matcha bubble tea (voir Zoom Japon n°143, septembre 2024) étant une spécialité taïwanaise et le matcha une spécialité japonaise) ne cessent d’augmenter. A bien observer la créativité des Taïwanais, la souplesse avec laquelle ils incorporent les ingrédients et les mets nippons dans leur culture, on peut imaginer que, si les Japonais faisaient preuve d’autant d’ouverture d’esprit et d’enthousiasme pour la cuisine taïwanaise, elle donnerait un beau fruit dans la scène culinaire japonaise.
Sekiguchi Ryôko