Célèbre pour sa culture de la fermentation, “la petite Kyôto” vous plonge dans cet univers de manière originale.
Si les produits de fermentation existent partout dans le monde, on peut dire que les Japonais sont particulièrement conscients de leur présence dans leurs aliments. Il existe d’une part une industrie agroalimentaire pétrie de législations strictes qui freinent la conservation des méthodes traditionnelles ; d’autre part, des reprises de flambeau de façon contemporaine, notamment par les jeunes générations. Ogura Hiraku, spécialiste de la fermentation, fait partie de ceux qui promeuvent le regain de la “culture de fermentation”.
Ce designer de formation, auteur de plusieurs livres de reportages sur des méthodes méconnues, sillonne les différentes régions du Japon et des pays asiatiques. Il organise actuellement un événement intitulé Hakkô Bunka Geijutsu sai [L’art et la culture de fermentation] à Kanazawa, en collaboration avec le musée d’Art contemporain du XXIe siècle de Kanazawa ainsi qu’avec Dominique Chen, chercheur spécialisé dans les études “des médias de fermentation”.
L’idée est de donner aux artistes de domaines aussi divers que la vidéo d’art, le textile, la musique ou la littérature, l’occasion de réfléchir sur la temporalité de la fermentation, le mode de vie et la notion de vie et de mort propres aux bactéries, ou encore le rapport que nous entretenons avec les vivants invisibles à l’œil nu. Chaque artiste interprète le thème de la fermentation dans son sens large et profond, en lien avec les vivants, et crée à cette occasion des pièces inédites.
La ville de Kanazawa, qu’on qualifie souvent de “petite Kyôto”, a été choisie pour sa tradition riche en matière de produits de fermentation. Elle réussit à préserver non seulement les méthodes traditionnelles de fermentation du miso et du shôyu (voir Zoom Japon n°125, novembre 2022), mais aussi les spécialités de la région, telle que kabura zushi (navet et poisson fermentés ensemble avec du kôji) ou fugunoko no nukazuke (ovaires de poisson fugu [réputé toxique] dont la salaison puis la fermentation de longue durée enlèvent la toxine).
Cette ville historique a échappé aux bombardements américains qui ont frappé les villes voisines pendant la guerre. Le musée et les caves traditionnelles de fabrication du miso et du shôyu, qui se trouvent dans le centre-ville ou à côté du port et qui conservent l’atmosphère d’antan, sont utilisés comme lieux d’installation.
Le musée d’Art contemporain du XXIe siècle de Kanazawa a, depuis son ouverture il y a 21 ans, largement contribué à démocratiser l’art contemporain. Son nombre de visiteurs compte, malgré la taille moyenne de la ville, parmi les plus fréquentés des musées japonais.
Pour ceux qui prévoient un voyage au Japon, Kanazawa à l’automne pourrait être une belle destination, à la fois pour contempler les pièces d’art contemporain, découvrir la ville traditionnelle et déguster une cuisine riche de son histoire et des apports bénéfiques de la fermentation.
Sekiguchi Ryôko
Informations pratiques
Ferment Arts and Culture Festival Kanazawa (Hakkô Bunka Geijutsu sai) jusqu’au 8 décembre, au musée d’Art contemporain du XXIe siècle à Kanazawa et des sites dans la ville : www.instagram.com/fermenarts/?hl=en