Murata Sayaka est un écrivain atypique que ce soit au niveau de son écriture qu’à celui de son parcours. Elle est une des révélations littéraires de 2016. A 37 ans, Murata Sayaka s’est imposée dans le quotidien des Japonais grâce à son dernier roman, Konbini ningen [Les Gens de la supérette, inédit en français], qui a obtenu le 155e prix Akutagawa, l’un des plus prestigieux prix littéraires du pays. Au-delà de la valeur littéraire de l’histoire, les médias se sont surtout intéressés au fait que, comme la protagoniste du livre, Murata Sayaka travaille à temps partiel dans une supérette depuis qu’elle a achevé ses études et qu’elle n’a pas l'intention de lâcher son emploi. Selon l’auteur, cependant, les similitudes entre le personnage du livre et elle s'arrêtent là. “Keiko, l’héroïne, est une personne qui semble savoir se débrouiller dans la vie, mais en réalité, elle ne sait pas comment faire. Elle ne comprend pas pourquoi les gens sont censés parler ou se comporter d’une certaine manière. Elle décide alors de faire semblant. Pour y parvenir, elle observe ses collègues et les autres personnes autour d'elle et les imite sans vraiment comprendre ce qu'elle fait. En fin de compte, le livre questionne les normes sociales en vigueur, et comment et pourquoi nous sommes socialisés.” J’ai trouvé sur Internet un texte que vous aviez écrit lorsque vous étiez au lycée. Il est intitulé Risô [Idéal, inédit en français]. Apparemment, à cette époque, vous n'aviez aucune confiance en vous et dans vos capacités. Vous avez écrit vouloir vivre en paix avec vous-même et le monde qui vous entoure. Pensez-vous avoir atteint ces objectifs ? Murata Sayaka : Je me sens plus détendue aujourd’hui. Quand j’étais au lycée, j’avais l'impression que je devais toujours être une gentille fille et me comporter selon des valeurs approuvées par la société. Je faisais tout pour être acceptée par les adultes. Mais maintenant, je m'accepte pour ce que je suis. Désormais, je sais que ça ne pose pas de problème d’être un peu bizarre. Cette prise de conscience m’a libérée. Y a-t-il quelque chose que vous aimeriez encore changer en vous-même ? M. S. : Je suis toujours trop timide. Quand je rencontre quelqu'un pour la première fois (ou même quelqu'un que j'aime beaucoup), je suis tellement nerveuse que j’ai du mal à m’exprimer. Il y a beaucoup de choses dont je voudrais parler, mais je peine à les formuler avec des mots. Je donne de plus en plus d’interviews, ce qui me rend très anxieuse. En même temps, j’ai vraiment envie de parler de mes romans, alors je me fais...