L'heure au Japon

Parution dans le n°113 (septembre 2021)

Les célèbres pêcheuses de perles ne sont plus aussi nombreuses que par le passé. / Gianni Simone pour Zoom Japon Fiction : James Bond et les perles Célèbre pour sa perliculture et ses plongeuses, la cité portuaire de Toba a aussi accueilli l’espion britannique. Je possédais un mauvais pressentiment sur Toba avant même que le ferry ne pénètre dans sa jolie crique isolée. La cité portuaire (17 494 habitants) est connue pour deux choses : les perles et les espions. L’île aux perles de Mikimoto est ce qui attire la plupart des touristes. Le roi de la perle de culture, mondialement connu, est synonyme d’élégance classique, et les Mikimoto ont construit une ode à leur empire de la bijouterie sur une petite île juste au large de la côte. L’île est reliée au continent par une passerelle en acier blanc et en verre peu traditionnelle, qui ressemble plus à une passerelle d’aéroport qu’à un pont. Et puis il y a le lien entre Toba et Bond, James Bond. Le cinquième volet de la saga de l’espion britannique, On ne vit que deux fois (You Only Live Twice), a été tourné en grande partie au Japon (voir Zoom Japon n°71, juin 2017) et Toba fut l’un des endroits où il s’arrêta sur son chemin entre Tôkyô et l’île de Kyûshû. A l’époque de la sortie du film, en 1967, les plongeuses de perles de la région étaient déjà devenues une attraction touristique et 007 ne pouvait que s’y rendre. Les ama - comme on appelle ces plongeuses au Japon - et leur lien avec Bond-san ont été la principale raison de ma visite, car je ne suis pas amateur de perles et de bijoux (c’est le domaine de ma femme).Dans la maison d’hôtes où je logeais, j’ai trouvé un livret de 52 pages en anglais publié par l’association touristique de la ville de Toba, qui répertorie tous les endroits merveilleux de la région. J’ai essayé de trouver quelque chose à faire, mais tout était uniformément peu inspirant. Je suis donc sorti pour me promener. C’est en arrivant sur le front de mer que j’ai appris l’horrible vérité sur Toba : la ville semblait être restée bloquée dans le “bon vieux temps” de l’ère Shôwa (1926-1989), et je ne dis pas ça comme un compliment.La pièce de résistance de Toba est le Kinpokan, un hôtel qui, j’en suis sûr, fut l’endroit le plus glamour de la ville lorsqu’il a ouvert ses portes dans les années 1960, probablement pour profiter des fans et des journalistes enragés qui suivaient Sean Connery partout où il allait. Par miracle, il existe toujours, bien que ses étages supérieurs ressemblent à un mélange entre un donjon et une ruine industrielle. A côté du Kinpokan, le Tiara Café a eu le bon goût de fermer il y a longtemps. En jetant un coup d’œil par ses fenêtres poussiéreuses, je peux voir un fouillis de tables, de chaises et d’autres objets non identifiés empilés les uns sur les autres.Nous ne savons pas où 007 a séjourné à son arrivée à Toba, mais il ne semble pas non plus avoir été particulièrement charmé par l’endroit. Parti de la gare de Tôkyô pour sa mission, il a été informé par l’agent Tiger que “nous prendrons l’express pour Gamagôri, sur la côte sud, et l’hydroptère du soir pour traverser la baie d’Ise jusqu’au port de pêche de Toba. Nous y passerons la nuit. Il s’agit d’un voyage lent vers Fukuoka dans le but de vous former et de vous éduquer. Il est nécessaire que je vous familiarise avec les coutumes et le folklore japonais afin que vous fassiez le moins d’erreurs possible.”A leur arrivée à Toba, Bond en avait assez de son immersion totale dans le mode de vie japonais et, comme l’explique l’auteur Ian Fleming, “il était heureux lorsqu’on le laissait enfin seul dans sa chambre d’une délicatesse exaspérante, avec l’habituelle petite théière, la petite tasse et la petite sucrerie enveloppée dans du papier de riz”.Peut-être sous l’influence de Bond, j’ai élaboré ma propre mission : profiter gratuitement des attractions touristiques de Mikimoto. Certes le musée Mikimoto et l’Ama Show sont peut-être intéressants, mais je ne suis pas prêt à débourser ...

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