A compter du 16 février, ne manquez pas de découvrir les 6 remarquables films tournés par la célèbre actrice.
Après une année 2021 qui a permis de confirmer de manière éclatante tout le talent d’un Hamaguchi Ryûsuke, dont Zoom Japon avait, il y a plus de 3 ans, déjà vanté les mérites (voir Zoom Japon n°80, mai 2018), 2022 s’annonce comme un moment où les amateurs de cinéma japonais vont enfin être en mesure de découvrir de grands réalisateurs dont ils ne soupçonnaient peut-être pas l’existence. Le premier nom, déjà évoqué dans notre précédente édition, est Yamada Yôji à qui la Maison de la culture du Japon consacre une première rétrospective tout au long de l’année. Le second est peut-être plus inattendu encore puisqu’il s’agit de Tanaka Kinuyo.
Considérée à juste titre comme l’une des plus grandes actrices japonaises, sinon la plus grande, après avoir joué pour Mizoguchi, Ozu ou encore Naruse, elle a choisi de passer derrière la caméra à une époque où cela paraissait inconcevable pour tourner 6 films, sur une dizaine d’années, qui représentent un véritable tournant dans l’histoire du 7e Art au Japon. En décidant de diriger ses propres films, la star ne fait pas un caprice. Elle s’y prépare conscieusement et doit affronter de nombreuses réticences, notamment de Mizoguchi Kenji qui ne cessera de la dénigrer. Elle est déterminée “à devenir réalisatrice parce que je voulais depuis longtemps que des femmes soient filmées par une femme, d’un point de vue qu’un homme ne comprendrait pas”, comme elle le déclare en 1954.
Grâce à Carlotta, inlassable dénicheur de films du patrimoine et de pépites qui éclairent l’histoire du cinéma, le public français a désormais la chance d’avoir accès à ces 6 films parmi lesquels figurent, il ne fait aucun doute, de véritables chefs-d’œuvre. Lettre d’amour (Koibumi, 1953), le premier d’entre eux, illustre parfaitement sa détermination dans ses nouvelles fonctions et sa capacité à créer un univers qui lui est propre. Mais c’est surtout avec Maternité éternelle (Chibusa yo eien nare, 1955) tourné juste après le très ozuesque La Lune s’est levée (Tsuki wa noborinu, 1955) qu’elle exprime le mieux sa sensibilité et sa vision du cinéma. Près de 70 ans après sa sortie, ce film reste le plus bouleversant de sa courte carrière de cinéaste dans lequel elle a mis “toute [s]a vie”, comme elle l’a alors expliqué. A travers le destin tragique d’une femme qui ne parvient qu’à s’exprimer à travers la poésie, Tanaka Kinuyo signe une œuvre rare, digne d’être classée parmi les plus grandes du cinéma japonais de l’après-guerre. Si vous n’avez qu’un film à voir parmi les 6, c’est bien celui-là. O. N.
Bientôt dans les salles
C’est le 16 février que vous pourrez découvrir en salles Lettre d’amour, La Lune s’est levée, Maternité éternelle, La Princesse errante (Ruten no ôhi, 1960), La Nuit des femmes (Onna bakari no yoru, 1961) et Mademoiselle Ogin (Ogin-sama, 1962).