Renforcement de l’alliance avec les Etats-Unis et soutien au dynamisme de l’ASEAN sont au programme.
Tout le monde s’accorde pour dire que les relations entre Tôkyô et Pékin n’ont guère de chances de s’améliorer. D’autant moins que les dirigeants des deux pays ne semblent guère décidés à reprendre le dialogue à leur niveau, ce qui permettrait sans doute de favoriser le dialogue. Il est même possible que les choses se détériorent encore si la confidence d’un proche du Premier ministre Abe se confirme. Alors que le chef du gouvernement japonais s’est abstenu de se rendre au sanctuaire Yasukuni à Tôkyô où est honorée la mémoire des hommes morts pour la patrie (y compris des criminels de guerre) afin d’éviter d’exacerber la colère de ses voisins, un de ses proches conseillers a confié qu’Abe Shinzô pourrait y faire un déplacement à la fin de l’année 2013. Une manière pour lui d’affirmer un changement dans sa vision des rapports en Asie. Ne pouvant pas espérer un renversement de tendance en Chine voire en Corée du Sud, le Premier ministre entend poursuivre sur la voie qu’il s’est fixée depuis son retour au pouvoir en décembre dernier. Tout d’abord, il s’agit pour lui de renforcer l’alliance avec les Etats-Unis après plusieurs années d’une diplomatie plus réservée à l’égard de Washington. Il s’est même fait l’avocat du Partenariat Trans-Pacifique (TPP), traité de libre-échange voulu par les Américains, alors qu’une majorité de Japonais y sont plutôt hostiles, y compris au sein de son propre camp. Mais à ses yeux, l’amitié avec les Etats-Unis est essentielle, car elle est synonyme d’une plus grande stabilité et elle lui donne une certaine assurance au moment où Chinois et Américains se cherchent réciproquement des poux dans la tête. S’appuyer sur l’alliance avec Washington permet aussi au Japon d’envisager de se rapprocher de l’Asie du Sud-Est qui constitue aujourd’hui une région en plein essor économique et qui connaît elle aussi des difficultés avec le voisin chinois. De nombreux différends territoriaux opposent certains pays de la zone à la Chine qui veut élargir son influence. Sur le plan économique, les entreprises japonaises multiplient les investissements dans la plupart des pays membres de l’ASEAN, l’Association des nations du sud-est asiatique et se détournent peu à peu de la Chine. Désireux d’accompagner la relance de l’économie japonaise en accroissant les exportations, Abe Shinzô s’est rendu dans la plupart des pays de l’ASEAN depuis le début de 2013. A la fin de l’année, il recevra les chefs d’Etat et de gouvernement de l’organisation régionale pour célébrer le quarantième anniversaire de ses liens d’amitié avec le Japon. Le Premier ministre a bien l’intention de profiter de ce moment symbolique pour faire des propositions substantielles à une Asie du Sud-Est qui n’en demandait pas tant. Il misera notamment sur la dimension culturelle des échanges, les Asiatiques étant très friands de la culture pop japonaise.
Gabriel Bernard