Pour de nombreux Japonais, le 11 mars a marqué un tournant dans leur vie. Zoom Japon en a rencontré quelques-uns.
Ils s’appellent Takeo, Kaori, Kiichirô et Ryûsuke. Ils sont Japonais et Tokyoïtes. Avant le 11 mars 2011, c’était bien là leurs seuls points communs. Mais cette date, celle du séisme qui a dévasté le nord-est de l’archipel, leur en a donné un autre : elle a changé le cours de leur vie.
Pour la majorité d’entre eux, ils étaient sur leurs lieux de travail quand la terre a tremblé. “Nous étions sur terre comme sur un bateau”, se souvient Kiichirô. De magnitude 9 sur l’échelle de Richter, le séisme du 11 mars est l’un des cinq tremblements de terre les plus importants enregistrés dans l’histoire du pays. Séisme, tsunami, répliques incessantes, accident nucléaire, radioactivité : Beaucoup pour un même pays. Aujourd’hui, plus de six mois après, la vie semble être revenue à la normale dans les rues de Tôkyô. Pourtant, si la capitale n’a pas subi ce qu’a vécu le Tôhoku, le quotidien n’y est plus tout à fait comme avant. L’inquiétude est bien présente.
De nombreuses questions restent en suspens : Quelle politique énergétique pour le pays? Doit-on interdire la consommation d’autres familles d’aliments qui présentent des risques de radioactivité ? Comment relancer l’économie dans un tel contexte ? Doit-on élargir la zone d’évacuation de Fukushima comme tendent à le demander des associations locales?
Le séisme a soulevé bien des questions
Après le choc, sont survenues les conséquences. Pour une région, mais aussi pour tout un pays. Aujourd’hui, de plus en plus de Japonais se lèvent pour exprimer leur colère, leur envie de connaître la vérité, mais aussi et surtout pour lancer un grand cri d’espoir.
Les quatre Japonais que nous avons rencontrés à Tôkyô et à Londres nous racontent leur histoire. De quelles manières le 11 mars a fait basculer leur vie. L’un a perdu un être cher dans le tsunami, l’autre a marché dans la capitale nipponne paralysée avant de retrouver son domicile. Tous ont vu leur pays meurtri dans sa chair.
Saijô Takeo, professeur de psychologie et de philosophie à l’université de Waseda, a fondé une association d’aide aux sinistrés du Nord-Est. Le projet Fumbarô, nom qui renvoie à la résistance des sumos dans l’effort. Aujourd’hui, il s’agit de la plus importante organisation indépendante de soutien aux victimes du sésime dans le Tôhoku. Son nouvel objectif est de réunir des fonds pour fournir des compteurs Geiger aux habitants de Fukushima. Murata Ryûsuke a accompagné journalistes et équipes de tournage occidentaux aux portes de la centrale nucléaire de Fuku-shima Dai-ichi et souhaite que les “étrangers comprennent mieux la solidarité exercée entre les Japonais”. Honda Kaori dit : “j’ai repris sa vie en mains parce que j’ai pris conscience de son impermanence. Que tout est en mouvement perpétuel et que la vie peut s’arrêter du jour au lendemain.” Nouvel emploi, nouvelle vie. Elle aimerait, aussi, comme beaucoup de Japonais depuis le séisme, rencontrer l’âme sœur. Enfin Satô Kiichirô, volontaire bénévole des premiers jours, a sillonné le nord-est de l’archipel dès le mois d’avril offrant son aide pour le déblaiement et la reconstruction. Non sans une longue hésitation, il a finalement décidé de quitter son pays pour l’Europe “pour réaliser un rêve et revenir en étant un autre homme. Plus fort et plus sûr de lui.” Il sera de nouveau prêt à remonter ses manches pour le Tôhoku lorsqu’il rentrera au Japon. Rencontres avec ces Japonais comme les autres. Ou pas tout à fait.
Johann Fleuri