L’écrivain Yomota Inuhiko a longtemps contribué à Garo. Il raconte l’impact du mensuel sur une partie de la société. Garo, ce serait un spectre installé au bord d’une rivière qui se moque des humains. Certains estiment qu’il s’agit d’un être semblable à un kappa baptisé Kawauro ou Kawatarô. Quoi qu’il en soit, dans le folklore japonais, c’est une présence importante proche des dieux comme les enfants. Garo désigne également l’homme obligé de vivre de façon marginale, car il a été exclu du centre des villes et des villages. A Ôsaka, le terme “Kadarô” est une insulte. Aujourd’hui encore, cela demeure un sérieux problème dans la société japonaise comme l’illustre le cas des Burakumin. Les écrivains de droite n’ont jamais cessé de publier des romans mettant en scène des généraux ou des samouraïs célèbres comme Miyamoto Musashi. Inspirés par la morale de ses prestigieux personnages, les lecteurs ont choisi de les prendre comme modèle. Cependant, des romanciers, des mangakas ou des réalisateurs de gauche se sont mis à raconter des histoires où les héros ne sont pas ces personnages célèbres mais des ninjas qui travaillent comme des esclaves sous leurs ordres. Les ninjas sont encore plus humbles que le samouraï issu de la couche sociale la plus basse. Utilisés par le pouvoir, ils ont pour mission de récolter des informations du côté ennemi et sont parfois amenés à commettre des actes de sabotage ou des assassinats. Quand ils ont atteint leurs objectifs, ils sont laissés à leur sort par les puissants ou pire encore éliminés pour ne laisser aucune trace. Parti étudier l’art d’avant-garde à Berlin dans les années 1920, Murayama Tomoyoshi, qui s’est investi dans l’art prolétarien à son retour au Japon, a publié jusqu’à la fin de sa vie des histoires de ninjas dans les journaux du Parti communiste japonais dont certaines, adaptées au cinéma, ont contribué à populariser le genre. Shirato Sanpei est le fils d’Okamoto Tooki, ami de Murayama, qui a joué un rôle central dans le même mouvement artistique prolétarien. Par ailleurs, Okamoto a été le professeur de dessin d’un certain Kurosawa Akira. Shirato a hérité de son père la philosophie communiste et le rejet du militarisme. Lorsqu’il a commencé sa carrière de mangaka dans les années 1950, son thème de prédilection était les ninjas. Au lieu de raconter de belles histoires d’assassinats, il mettait l’accent sur la misère de ces hommes utilisés comme des chiens par les puissants. Dans ses mangas épiques, le ninja prend la tête des mouvements de révolte paysanne, mais en rompant avec la communauté des ninjas, il doit survivre comme un...