Inspiré par le Japan Punch de Charles Wirgman, Tôbaé de Georges Bigot a eu une belle influence. / Collection Christian Polak Compte tenu de son statut de port ouvert sur l’étranger, la ville a été au cœur du journalisme moderne. C’est à Yokohama que l’histoire du journalisme moderne au Japon a commencé. Le premier journal publié par une entreprise japonaise a été le Yokohama Mainichi Shinbun. Il est paru le 28 janvier 1871 et, contrairement aux anciens journaux en langue japonaise de la période Edo (1603-1868), il utilisait des caractères en plomb et une presse parfaite sur du papier occidental. Le gouverneur de la préfecture de Kanagawa, Iseki Moriyoshi, serait à l’origine de cette initiative. Il était convaincu que les commerçants et autres hommes d’affaires japonais qui s’étaient installés à Yokohama lorsque la ville est devenue un port international avaient besoin d’un journal moderne. En effet, au début, les informations commerciales représentaient le contenu principal du quotidien, mais dans les années suivantes, il s’est progressivement transformé en un porte-parole du mouvement des droits civiques.Comme dans beaucoup d’autres entreprises du début de l’ère Meiji (1868-1912), la naissance de la presse japonaise moderne a été inspirée par le travail d’une poignée d’étrangers entreprenants. En fait, au moment où le premier numéro duYokohama Mainichi Shinbun fut publié, quelques quotidiens étaient déjà en circulation, et Yokohama était au centre de cette activité.Le premier de ces journaux, le Japan Herald, a vu le jour le 23 novembre 1861. Fondé par l’Anglais A. W. Hansard, il s’agissait d’une publication de quatre pages, initialement imprimée sur du papier de format tabloïd. Elle utilisait l’impression à caractères mobiles et paraissait tous les samedis soirs. La couverture du Japan Herald allait des annonces officielles des différents consulats aux nouvelles de Yokohama, du Japon et du monde. Les conditions du marché et les horaires des navires étaient rapportés, et la publication présentait même des publicités pour les sociétés commerciales basées à Yokohama et à Shanghai. Avec le Japan Herald, Yokohama disposait de son premier journal moderne fournissant des informations précises et opportunes à une large base de lecteurs.Bien sûr, cela ne veut pas dire qu’il n’y avait pas eu de journaux d’aucune sorte au Japon auparavant. Dès le début de la période Edo, les Japonais lisaient avec avidité des journaux de grande taille appelés kawaraban qui mélangeaient images et textes. Ces kawaraban, cependant, étaient en quelque sorte des “éditions spéciales” puisqu’ils n’étaient publiés qu’en réponse à des événements ou des incidents particuliers.Lorsque le Japan Herald et d’autres journaux de langue anglaise sont apparus à Yokohama, le shogunat a commandé des traductions en japonais et des copies manuscrites pour les fonctionnaires du gouvernement. Appelés hon’yaku hissha shimbun (journaux de traduction et de transcription), ils ont constitué une étape importante dans l’histoire de la presse nippone. Le lectorat était toutefois strictement limité à l’élite des fonctionnaires du shogunat et des gouvernements des clans féodaux. En 1863, Hansard est entré à nouveau dans l’histoire en fondant le Daily Japan Herald, le premier quotidien du Japon. Il a continué à développer régulièrement son entreprise, lançant plus tard un bihebdomadaire pour les lecteurs étrangers. Le succès du Japan Herald provoqua une ruée vers les journaux concurrents de langue anglaise à Yokohama. Le Japan Commercial News commença à paraître en mai 1863, suivi du Japan Times en septembre 1865. La Japan Gazette fut lancée en octobre 1867 et le Japan Weekly Mail en janvier 1870, le même mois que le lancement du journal francophone L’Echo du Japon.Les résidents étrangers de Yokohama n’étaient pas les seuls à avoir besoin de journaux. C’est en réponse à la demande croissante des lecteurs locaux qu’en 1864, Joseph Heco a fait une première tentative de publication d’un journal en langue japonaise, le Kaigai Shimbun. Heco, malgré son nom, était japonais de naissance et s’appelait à l’origine Hamada Hikozô. Alors qu’il était en mer pendant la période du sakoku, il fut secouru par un navire américain et emmené aux États-Unis où il apprit la langue et fut naturalisé. Lorsque le Japon s’est ouvert au commerce extérieur, il est rentré dans son pays et est devenu une source importante d’informations sur le reste du monde. Bien qu’à certains égards, le Kaigai Shimbun puisse être considéré comme le...