A quel âge êtes-vous tombée dans l’univers du polar ?
Miyabe Miyuki : Je ne me souviens pas exactement l’âge que j’avais. Je devais avoir entre 10 et 12 ans. Je pense que c’est par le cinéma et les téléfilms que je m’y suis intéressée. A ce moment-là, je m’intéressais davantage à ce qui venait de l’étranger. Ce n’est qu’à la sortie de l’adolescence que j’ai commencé à lire des romans policiers japonais, en particulier Matsumoto Seichô et Yokomizo Seishi.
Qu’est-ce qui vous a incité à écrire ?
M. M. : J’ai simplement voulu écrire ce que j’aimais lire. C’est encore vrai aujourd’hui. Je suis ce qu’on appelle une fan écrivain.
Les auteurs qui vous ont influencée ?
M. M. : Ils sont nombreux. Même si je n’ai pas lu beaucoup d’auteurs européens, j’apprécie beaucoup les enquêtes du commissaire Beck signées par le duo suédois Maj Sjöwall et Per Wahlöö et qui ont pour cadre Stockholm. Parmi les auteurs français, j’ai adoré les œuvres de Catherine Arley qui ont été traduites à de nombreuses reprises au Japon. Depuis quelques années, les romanciers allemands ont le vent en poupe au Japon. A cette occasion, j’ai découvert Sebastian Fitzek et son roman Thérapie [éd. L’Archipel, 2008] que j’ai trouvé particulièrement intéressant. Sa construction très dense et le soin apporté à la mise en place du mécanisme qui mène à la solution de l’énigme m’ont rappelé le style des polars japonais.
Lorsque vous entamez l’écriture d’un roman, cherchez-vous à l’ancrer dans la réalité sociale du moment ?
M. M. : C’est une question bien difficile que vous me posez. Il n’est pas évident pour moi de trancher par oui ou par non. Ce que j’ai envie de vous dire, c’est que mes livres « ne décrivent pas la société », ils portent avant tout un regard sur la vie.
Quel est le roman qui a été le plus difficile à écrire pour vous ?
M. M. : C’est celui que je suis en train d’écrire sous forme de feuilleton dans le mensuel Shôsetsu Shinchô. Il s’intitule Soromon no gishô [Le témoignage de Salomon] et j’en ai encore pour environ deux ans avant de l’achever. Il se déroule dans le milieu scolaire et met en scène des enfants âgés d’une dizaine d’années. Ce n’est pas du tout évident.
Propos recueillis par Odaira Namihei
Cruelle virtualité
Internet, on le sait, c’est drôlement pratique. Ça l’est tellement que certains y mènent une double vie. C’est le cas de Tokoroda Ryôsuke, cadre dans une société de produits alimentaires, marié et père d’une adolescente. Pour cet homme apparemment sans histoire, les choses ont mal tourné. Il a été lardé de vingt-quatre coups de couteau. Cet assassinat est le point de départ de ce roman palpitant qui démontre une nouvelle fois la maîtrise de Miyabe Miyuki qui déroule son récit avec minutie, entraînant le lecteur dans toutes les directions sans que celui-ci n’y trouve rien à dire. Après le décevant Crossfire (trad. par Gérard Siary et Mieko Nakajima-Siary, éd. Philippe Picquier, 2008], Du sang sur la Toile signe le retour en forme de la reine japonaise du crime.