Dans vos chansons, vous abordez les thèmes du pouvoir, la mécanisation de la société. Que pensez-vous par exemple de l’immigration ?
Tamura Takashi alias Dengaryû : Avant Saudade, je ne connaissais même pas de Nikkei. Même dans les petites villes comme Kôfu, je n’ai pas eu l’occasion d’en rencontrer. C’est ça la realité des immigrés au Japon : on ne se mélange pas. On a commencé à sympathiser avec Dennis et les autres Nikkei mais ils sont tous repartis chercher du travail au Brésil ou autre part au Japon. Même la Thaï est repartie. La réalité dépasse la fiction !
Vous avez composé une chanson qui s’intitule Route nationale 20 comme le film de Tomita. Est-ce un hasard ?
T. T. : Oui. On s’est apercu qu’on avait pas mal de points communs. Cette route qui est devenu le passage obligé des gens de la région. Elle est le symbole pour nous de la “fast-foodisation” de la société. L’uniformisation des prix et des lieux a entraîné la destruction de l’économie locale.
Lors de votre dernier concert à Tôkyô, vous avez projeté des vidéos prises lors des manifestations antinucléaires organisées devant la résidence du Premier ministre. Y avez-vous participé ?
T. T. : Non, notre forme de participation est plus artistique. Je pense que c’est bien de faire de l’action directe, mais je crois que ça ne va pas durer. Les manifs ont atteint un pic de 300 000 personnes, ce n’était pas arrivé depuis 40 ans. Les organisateurs essaient de faire ça sur la durée. Mais les gens se lassent et oublient vite. On peut néanmoins continuer à agir au niveau individuel, en en parlant à ses enfants et autour de soi. Je pense que c’est là où se situe la force des Japonais. Ils ont une force d’endurance hors du commun, et beaucoup de sang-froid. A l’étranger, on pense peut-être qu’on est peu réactif après un accident pareil, mais franchement, je ne souhaite pas voir les Japonais trop s’énerver ! Car si tout le peuple japonais se met en colère, ça risque de tourner au film d’horreur !
Propos recueillis par Alissa Descottes-Toyosaki