Depuis des années, les habitants se mobilisent contre les bases américaines et leur extension. En vain pour l’instant.
Au son du tambour bouddhique, le sitting commence comme un rituel. Une vingtaine de manifestants prennent place en silence sur des planches pour barrer le passage aux camions de construction du site N1 à Takae. De part et d’autre de la route, la forêt luxuriante de Yanbaru baigne encore dans la brume matinale. C’est dans ce paradis perdu au nord d’Okinawa que doivent être construits six héliports qui feront partie de la nouvelle base de Henoko, la base américaine la plus importante d’Asie de l’Est. Les forces de l’ordre “kidôtai” (CRS) se mettent en position aussi, un air de lassitude sur le visage. Il pleut.
Mais la détermination des manifestants en a vu d’autres. Cela fait vingt ans qu’ils s’opposent au projet de Henoko et dix ans qu’ils viennent faire blocus au projet de Takae. Une grande tente qui fait office d’abri et de tribune marque leur territoire. On peut y voir des coupures de journaux retraçant l’histoire de la Bataille d’Okinawa qui a décimé un quart de la population en 1945. Administré jusqu’en 1972 par les Américains, l’archipel situé à environ 2000 kilomètres de Tôkyô a servi de base-arrière pendant la guerre du Vietnam. Aujourd’hui encore, Okinawa abrite 75 % des forces américaines présentes au Japon depuis 1945, soit environ 30 000 militaires. Une occupation illégale pour la population locale qui dénonce les crimes, les accidents et les nuisances sonores subis depuis 70 ans alors que le gouvernement Abe cherche, de son côté, à renforcer la présence militaire “face à la menace grandissante de la Chine et de la Corée du nord”.