Portant le nom du célèbre guerrier Genghis Khan, ce met à base de mouton est une des spécialités de Hokkaidô.
Se rendre à Hokkaidô est l’assurance à la fois de découvrir des paysages magnifiques, mais aussi de revenir conquis par la richesse de sa gastronomie. En tant que grenier du Japon, de la diversité de sa production agricole, la seconde île de l’archipel nippon est en mesure de satisfaire tous les goûts. Lorsqu’on demande à un Japonais de citer un plat typique de la région, il est très probable qu’il réponde avec un certain enthousiasme : “râmen !” Il est vrai que de nombreux spécialistes situent dans cette partie du pays l’origine de ces nouilles en bouillon (voir Zoom Japon n°26, décembre 2012). En dehors de Tôkyô, n’est-ce pas à Sapporo que l’on trouve le plus grand nombre de restaurants de râmen ? Deux autres cités de l’île, Asahikawa et Kushiro, sont aussi célèbres pour leurs râmen que de nombreux touristes viennent déguster.
Mais il n’y a pas que les râmen dans la vie. Et certains aventuriers du goût vous diront qu’il faut chercher ailleurs la spécialité de l’île et que celle-ci s’appelle le Genghis Khan ou Jingisukan dans sa translittération japonaise. Jingisukan quèsaco ? Il s’agit d’un plat de viande de mouton que l’on fait griller accompagné de différents légumes. Si aujourd’hui, on estime de façon officielle que cette spécialité est liée à Hokkaidô, sa paternité fait débat tout comme l’origine de son nom. En effet, la ville de Tôno, célèbre pour être le lieu d’origine des kappa, ces êtres espiègles du folklore nippon, estime qu’elle est aussi l’endroit où l’on a consommé pour la première fois ce plat tout comme la préfecture de Nagano. Mais depuis 2007, le ministère de l’Agriculture a décidé que c’était à Hokkaidô que revenait l’insigne honneur d’être la capitale du Genghis Khan.
Reste qu’une fois l’origine géographique établie, le mystère de son nom demeure. Certaines voix affirment qu’il le doit à la forme de la plaque servant à sa cuisson. Elle ressemblerait aux casques des soldats mongols de Genghis Khan. Mais il est à peu près sûr que le célèbre guerrier n’est jamais passé par Hokkaidô bien qu’une légende prétend le contraire. Comme cette partie du pays n’a été vraiment mise en valeur qu’à partir du XIXe siècle, il est plus probable qu’il faille chercher en Chine, et plus particulièrement en Mandchourie, l’origine de ce plat que les Japonais installés dans ces régions auraient découvert et ensuite importé dans l’archipel en lui donnant un nom exotique. D’ailleurs, le premier restaurant spécialisé dans le Jingisukan a ouvert à… Tôkyô, en 1936.
Son enracinement et son développement à Hokkaidô sont liés à l’élevage de moutons qui y a pris de l’ampleur sous l’impulsion des autorités. Sa consommation y a augmenté au lendemain de la Seconde Guerre mondiale avec l’ouverture d’un premier établissement à Sapporo en 1946. Depuis, les habitants l’ont définitivement adopté. Le reste des Japonais a redécouvert le Jingisukan au bénéfice de la crise de la vache folle au début des années 2000. La crainte suscitée par les risques de contamination liés à la consommation de bœuf a conduit les Japonais à se tourner vers cet autre plat de viande très convivial. On trouve ce plat, un peu partout dans des restaurants spécialisés. C’est pourtant un mets onéreux surtout s’il est cuisiné avec du mouton élevé à Hokkaidô.
O. N.