“Coronavirus : Au Japon, des rumeurs de ruptures de stocks provoquent une ruée sur le papier-toilette et les mouchoirs.” tel est le titre d’un article paru dans 20 minutes, le 1er mars 2020. Cette information était exacte, je l’avais lue dans la presse japonaise le mois précédent puis, une copine tokyoïte m’avait confirmé un peu plus tard qu’elle ne pouvait plus trouver un seul rouleau de papier-toilette dans son quartier. Mais je m’arrête sur la petite différence qu’il y a entre l’expression employée dans le quotidien français, “rumeur”, et celle du journal nippon : dema. Alors que la première désigne une information non vérifiée diffusée dans le public, équivalent du mot uwasa en japonais, dema se traduit par “information manipulée” ou encore “fake news”. Malgré les appels à la “sérénité” lancés par le gouvernement, mes compatriotes continuent à vider des rayons de supermarchés. Dema circule plus vite que le virus. En France, les citoyens ne sont pas touchés par le dema, mais par une sorte d’hypnotiseur qui les incite à vider les rayons pour… au cas où… Par ailleurs, suite aux uwasa entendus sur le racisme lié au Covid-19 envers les personnes d’origine asiatiques, tant en France que dans le monde, je fais attention à mon comportement quand je sors. Mais ce n’est pas si facile. Un jour, assise dans un TGV rempli de voyageurs, alors que je n’ai pas pu m’empêcher de tousser, mon voisin s’est levé et parti dans une autre voiture. Je n’ai même pas eu le temps de lui expliquer que c’était à cause d’un morceau de biscuit que j’étais en train de grignoter ! A vrai dire, j’étais plutôt contente de profiter de sa place libérée tout au long de mon voyage. Mes amis japonais à Paris vivent des situations semblables et, pour nous, ce genre de réaction reste compréhensible, tant que nous ne sommes pas réellement harcelés. Parce que, nous aussi, nous nous méfions de nos chers amis français qui tiennent tant à leur liberté ! Et cela ne relève pas d’un simple uwasa, me semble-t-il.
Koga Ritsuko