L’impressionnant site volcanique réserve de nombreuses surprises à tous les amoureux de la nature.
La route baptisée Aso panorama line serpente autour des flancs des volcans recouverts à perte de vue de roseaux à plumes blanches qu’on appelle herbe des pampas. Nous ne sommes pourtant pas en Argentine, mais à l’ouest du Japon sur l’île de Kyûshû, une immense région volcanique au cœur de la préfecture de Kumamoto. “Regardez, voici le Nakadake”, lance Yui, notre guide, en pointant un cratère fumant qui culmine à 1 506 m. La dépression volcanique du mont Aso, une des plus étendues au monde, compte cinq sommets dont le Komezuka, un cône symétriquement parfait recouvert d’herbes jaunes qui ressemble à un énorme flan au caramel posé sur la plaine. La route continue de monter jusqu’à l’entrée du parc national Aso-Kujû (Aso Kujû kokuritsu kôen), puis jusqu’à promixité du Nakadake enveloppé d’impressionnantes fumerolles blanches. Vieux de 300 000 ans, le volcan le plus actif du Japon est le seul à pouvoir être approché de près malgré les gaz toxiques émis à différents degrés selon les jours. “Les personnes souffrant d’asthme ou de problèmes respiratoires sont invitées à ne pas s’approcher du bord du cratère !” crient les haut-parleurs en trois langues. “Le téléphérique qui mène au cratère est toujours hors-service”, prévient Yui en se dirigeant vers le péage. L’affluence touristique s’est nettement réduite depuis le séisme qui a frappé Kumamoto en avril 2016 causant peu de pertes humaines, mais d’importants dégats matériels. L’employé nous redemande si nous sommes en bonne santé, puis nous donne un dépliant qui ressemble plus à une consigne en cas d’urgence qu’à un guide touristique. “Danger !! Emission de gaz volcanique !!” peut-on voir inscrit en rouge sur une carte avec des explications sur les symptômes en cas d’inhalation de dioxyde de soufre ou d’hydrogène sulfuré. “Aujourd’hui, le volcan est particulièrement actif”, explique Yui en observant l’absence de randonneurs qui empruntent habituellement les sentiers pour atteindre le cratère. Quelques minutes plus tard, nous nous garons dans un parking près de nombreuses barrières effondrées par le séisme. L’air lourdement imprégné de gaz et la présence de bunkers achèvent de donner au lieu une touche infernale. Dieu protecteur des catastrophes, le mont Aso a connu plus de 160 éruptions depuis 533, sa première colère documentée au Japon. Il reste l’un des 110 volcans les plus actifs au Japon (voir Zoom Japon n°45, novembre 2014). Au bord du cratère géant de 600 m de diamètre, une épaisse masse de fumée danse dans le vent. Le lac en dessous est complètement invisible. “Il suffit que le vent change de direction pour l’apercevoir”, confirme un gardien protégé par un masque qui incite les visiteurs à se montrer un peu patient. Cet employé du parc national se relaie toutes les heures avec trois autres gardes en raison des gaz toxiques. A côté de lui, un vendeur essaie d’attirer quelques touristes chinois : “Venez acheter le soufre du Nakadake ! C’est un répulsif très efficace contre les serpents, les fourmis, les taupes et même les corbeaux !” s’exclame-t-il en montrant son étal couvert de minerai jaune. “Vous auriez dû voir les pierres projetées lors de l’éruption il y a deux ans, elles pesaient au moins 35 tonnes”, reprend le gardien. En octobre 2016, le tumultueux volcan est entré en éruption “explosive” qui s’est traduite par une élévation du niveau d’alerte à 3 sur une échelle de 5. L’éruption surprise a recouvert d’une épaisse couche de cendre noire la ville d’Aso peuplée de 100 000 âmes et provoqué une certaine crainte chez les habitants. En 2014, le mont Ontake, dans le centre de l’Archipel, s’était réveillé de manière complètement inattendue et avait fait plus de 60 victimes, pour la plupart des randonneurs, rappelant à tous l’imprévisibilité de la nature (voir Zoom Japon n°45, novembre 2014).