 
 Dans son film Kome, Imai Tadashi souligne les difficultés rencontrées par les riziculteurs. / DR Contrairement à d’autres aliments bien traités par la culture pop, le riz suscite un intérêt bien moindre. La culture du riz est tellement forte au Japon que, dans un sens, elle est considérée comme allant presque de soi. Les rizières, par exemple, appartiennent tellement au paysage que de nombreuses histoires, et d’innombrables romans et films évoquent des scènes où le riz est planté, récolté, vendu, cuisiné ou mangé. En revanche, il n’est pas facile de trouver des œuvres de fiction où cet aliment occupe une place centrale.C’est le cas de Kome [Gens de rizière, inédit en France], un film d’Imai Tadashi dont les protagonistes sont des riziculteurs qui luttent pour survivre dans un monde rude. Le film est sorti en 1957, une année importante dans l’histoire du Japon, car le pays laissait enfin derrière lui les années difficiles de l’après-guerre. L’énergie nucléaire était considérée comme le meilleur moyen d’atteindre l’autosuffisance énergétique et, un an plus tard, le gouvernement allait approuver le projet de construction du Shinkansen, le train à grande vitesse. Pourtant, l’électricité n’était disponible que la nuit dans les zones rurales. Dans les grandes villes, les voitures, l’eau courante, le gaz et le téléphone étaient peut-être chose courante, mais pour de nombreuses familles vivant dans la campagne profonde d’Ibaraki, où se déroule l’histoire, tout cela relevait encore du rêve.L’œuvre d’Imai Tadashi dépeint la vie de personnes pauvres qui tentent de garder la tête hors de l’eau et de s’accrocher au peu qu’elles ont tout en essayant de rembourser leurs dettes. Une agricultrice, par exemple, est le soutien de sa famille car son mari est malade et trop faible pour travailler. Elle essaie de gagner de quoi tenir toute l’année en travaillant dans une petite rizière et en pêchant des anguilles avec l’aide de sa fille qui vient d’avoir 18 ans. Cependant, son propriétaire (lui-même loin d’être riche) veut récupérer sa petite rizière pour la donner à son fils, afin que le jeune garçon puisse fonder sa propre famille. Ensuite, deux jeunes hommes retournent dans leur petit village et tentent de subsister en tant que pêcheurs. Ils louent un chalutier à un propriétaire de bateau et, pour rester dans la course, ils finissent par enfreindre la loi en pêchant au-delà de la zone permise.Le cadre naturel (Tsuchiura, le mont Tsukuba et le lac Kasumigaura, le deuxième plus grand du Japon) est magnifiquement photographié, mais les personnages n’ont guère le temps d’en profiter. Ils sont trop occupés à essayer de survivre.Le film s’ouvre sur la fête annuelle de la plantation du riz et montre ensuite le quotidien des paysans – plantation manuelle du riz, puisage de l’eau dans les rizières à l’aide d’une roue à eau actionnée par les pieds, désherbage sous le soleil brûlant, soirées alcoolisées. Il y a des jeunes partout, mais bientôt, beaucoup d’entre eux seront obligés de quitter la campagne pour trouver des emplois manuels à Tôkyô et dans d’autres grandes villes. Quelques années plus tard, le plan national de développement global conduira à l’industrialisation de la région et le Premier ministre Tanaka Kakuei (voir Zoom Japon n°69, avril 2017) promettra des travaux publics à grande échelle. Cependant, aujourd’hui encore, seule une petite partie du secteur agricole est rentable. Il dépend encore de l’aide de l’Etat.En même temps, on a l’impression que la vie à la campagne dans les années 1950 était dure mais que les gens ne se sentaient pas seuls. Aujourd’hui, la campagne est principalement peuplée de personnes âgées.Avance rapide jusqu’en 2021 avec le riz au cœur de Dai kome sôdô [Angry Rice Wives, inédit en France]. Le réalisateur Motoki Katsuhide est surtout connu pour ses comédies et ses films fantastiques, mais cette fois, il se plonge dans l’histoire du Japon et s’attaque à l’émeute du riz de 1918 qui s’est produite dans une pauvre cité de pêcheurs de la préfecture de Toyama, au nord-ouest de Tôkyô. Ce type d’émeutes était assez courant dans le passé, mais...
