J’aime me poser seule dans un café, aller au musée seule, voire même voyager de temps en temps seule me fait du bien. Cela m’est aussi naturel d’être seule que d’être accompagnée, et mes amies parisiennes sont pareilles. Néanmoins ce n’est apparemment pas le cas pour toutes les femmes vivant au Japon. Depuis l’année dernière, la série TV intitulée Soro-katsu Joshi no Susume [Conseils pour les filles en soro-katsu] encourageant les femmes quadras à sortir seules, a connu un grand succès et, le terme soro-katsu est à la mode. Composé de “soro” qui se prononce “solo” et, “katsu”, abréviation de katsudô signifiant “activité”, cette expression est née, il y a cinq ans environ, pour désigner les activités en solo que les jeunes femmes pratiquaient pour enrichir leur vie de célibataire et donner une dimension positive à leur situation solitaire en attendant de trouver l’âme-sœur. C’est sans doute une des conséquences du phénomène social évoqué par la sociologue Muriel Jolivet dans son entretien à Zoom Japon (voir n°99, avril 2019), selon lequel on voit une augmentation exponentielle des “célibataires à vie”au Japon pour diverses raisons telle que la précarité. La tendance est particulièrement forte notamment chez les moins de 40 ans.
Grâce à la diffusion de la série, sans oublier la pandémie ayant favorisé l’isolement, le soro-katsu n’est plus réservé aux célibataires et tout ce qui est solo se développe à grand pas : soro-meshi (repas), soro-karaoke, soro-kyanpu (camping), etc… Il existe des mots classiques équivalents de “seul” comme hitori ou ohitori-sama mais, pour mes compatriotes, soro sonne plus stylé et moins triste à l’oreille. Cela signifie que de nombreuses Japonaises ont besoin d’un terme “stylé” pour sortir seules sans complexe.
Avec quelques exercices, elles pourront faire un jour leur soro-Paris, soro-café, soro-champagne lors d’un soro-vernissage, soro-voyage à Lille et une soro-attente du TGV qui a 2 h de retard, si elles le souhaitent !
Koga Ritsuko