Après les Japonais qui ont craqué pour ces personnages plus mignons les uns que les autres, c’est au tour du reste du monde. Pas facile d’y échapper pour ne pas dire impossible. Les mascottes sont partout. Les kyara comme on les appelle dans l’archipel (de l’anglais character, “personnage”) ont envahi le paysage urbain, télévisuel, publicitaire comme jamais par le passé. Il y a les yuru kyara, ces mascottes un peu maladroites que les Japonais plébiscitent, les gotôji kyara ou mascottes de terroir qui incarnent une ville ou une région. Quel que soit leur genre, les mascottes sont désormais au cœur du paysage japonais. Le phénomène n’est pas récent, mais il a pris une ampleur inédite ces quatre dernières années comme si les Japonais avaient besoin de trouver dans ces personnages kawaii un réconfort que les recettes traditionnelles ne sont pas en mesure de leur apporter. Comme le souligne avec pertinence Koyama Kundô, qui a présidé à la naissance de Kumamon, la mascotte la plus populaire de ces dernières années, les mascottes ont remplacé le personnel politique qui a abandonné le terrain pour des sphères éloignées des préoccupations locales. Les kyara peuvent naître d’initiatives commerciales ou institutionnelles comme ce fut le cas pour Kumamon, mais bien souvent ces personnages sont créés par des anonymes comme Funasshî qui représente désormais, de façon non-officielle, la ville de Funabashi, dans la préfecture de Chiba, à l’est de Tôkyô. C’est un citoyen de la ville qui a créé ce personnage unisexe en forme de poire (nashi en japonais), jouant ainsi sur le nom de la ville. Cette mascotte plutôt remuante et qui n’a pas sa langue dans sa poche a conquis rapidement le public, devenant l’un des personnages les plus populaires de l’archipel. Même si la municipalité refuse de la reconnaître comme sa mascotte officielle (pour des raisons de contrôle de son image), force est de reconnaître qu’elle a largement contribué à faire sortir la ville de son anonymat. En août 2013, Funasshî a été élue mascotte numéro un du Japon, détrônant Kumamon. Les mascottes représentent aussi un business considérable. Dans le seul cas de Funasshî qui ne représente pourtant officiellement aucune collectivité locale, son chiffre d’affaires généré a dépassé les 868 millions de yens en 2013. Ses multiples apparitions sur les plateaux de télévision ne sont pas étrangères à ce succès. Si l’on s’intéresse à Kumamon qui est le kyara officiel de la préfecture de Kumamoto, sur l’île de Kyûshû, le chiffre d’affaires est encore plus considérable puisqu’il a avoisiné les 29 milliards de yens. L’ours noir qui fait craquer tout le monde a même réussi à être salué par l’empereur lors de son déplacement dans la...